Riposte graduée ? - La Quadrature du Net

vendredi 18 février 2011

Conflits d'intérêts. De l'assurance, que diable !

Dans la continuité de mon précédent billet, une autre question sur les conflits d'intérêts et le mélange entre intérêts privés et publics. Une question du groupe GDR qui regroupe les communistes et les verts. La réponse gouvernementale pleine d'assurance montre désormais que le fossé entre le peuple et les personnes qui les gouvernent se creuse chaque jour un peu plus.

« Conflits d’intérêts

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Mme Jacqueline Fraysse. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Depuis 2007, ce gouvernement nous a habitués à mélanger allègrement intérêts publics et intérêts privés (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP), ce qui a conduit à des situations inacceptables et à des décisions dangereuses.

Ainsi, la loi sur les jeux en ligne a permis à quelques amis du Président de la République de régulariser les sociétés dans lesquelles ils avaient pris des parts.

M. Maxime Gremetz. Eh oui !

Mme Jacqueline Fraysse. De même, la réforme des retraites, en encourageant le développement des fonds de pensions, va directement bénéficier au frère du Président.

M. Maxime Gremetz. Eh oui !

Mme Jacqueline Fraysse. Celui-ci, délégué général du groupe Malakoff-Médéric, vient en effet de lancer, au début de cette année, un fonds de pension en association avec la Caisse des dépôts et consignations. Quel flair ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Un autre exemple, plus dramatique, nous est fourni par l’affaire du Mediator, produit par les laboratoires Servier, dont deux salariés étaient des conseillers de M. Bertrand lors de son premier passage au ministère de la santé. (Huées sur quelques bancs des groupes GDR et SRC.)

Les lobbies, notamment ceux de la finance, sont au cœur du pouvoir. Le dossier de la dépendance risque de nous en fournir un nouvel exemple. L’obstination de Nicolas Sarkozy, du Gouvernement et de Mme Parisot à offrir la dépendance aux assureurs privés, alors même que 75 % de nos concitoyens sont favorables à sa prise en charge solidaire et publique, s’éclaire d’un jour particulier lorsqu’on sait que le directeur général du principal réassureur des mutuelles a travaillé sur ce dossier pour trois ministres du travail successifs, dont M. Bertrand, et que l’ancien directeur général de la cohésion sociale, autre ex-collaborateur de M. Bertrand (Exclamations sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC), a rejoint depuis peu l’assureur privé Groupama.

Monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin décider de mettre un terme aux conflits d’intérêts ?

M. le président. Merci…

Mme Jacqueline Fraysse. Sur le dossier de la dépendance, allez-vous décider de résister aux lobbies ?(Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Madame Fraysse, cessez de formuler des accusations inutiles,…

M. Maxime Gremetz. Ce ne sont pas des accusations inutiles, c’est la vérité !

M. le président. Monsieur Gremetz !

M. François Baroin, ministre. … indignes des enjeux du travail législatif qui tend à définir des bornes plus strictes en matière de conflits d’intérêts.

Entendons-nous ensemble sur la définition des conflits d’intérêts, sur le périmètre d’une réforme qui ne doit pas déboucher sur une forme de criminalisation de la vie politique, car cela ne serait pas plus acceptable que les faits qui ont été dénoncés et qui ont pu choquer l’opinion publique.

Vous avez pris certains exemples ; nous pourrions en citer d’autres, à rebours.Prenons celui du directeur de cabinet d’un ministre important, qui a autorité sur le secteur bancaire, et dont le fils, ayant fait des études, se destine à une carrière dans ce même secteur.

M. Maxime Gremetz. Qui est-ce ? Des noms !

M. François Baroin, ministre. Voilà qui débouchera sur une confrontation curieuse, une subversion moderne de Kramer contre Kramer car, si l’on mène jusqu’à son terme la logique de certains ayatollahs, la criminalisation de la société française par l’intermédiaire de la responsabilité publique, …

M. Maxime Gremetz. Pas de prison pour les députés !

M. le président. Monsieur Gremetz !

M. François Baroin, ministre. … ce sera la carrière du père contre celle du fils.

Je souhaite que la consultation effectuée ici par des membres de l’UMP et du Parti socialiste – Mme Grosskost et M. Balligand – et au Sénat, par parallélisme des formes, grâce à la coordination entre la majorité et l’opposition, permette de définir les contours de ce qui est acceptable dans la société moderne, aujourd’hui, en 2011.

Il s’agit de déterminer des frontières afin d’éviter, en effet, toute porosité entre activité publique et activité privée.

M. Maxime Gremetz. Les avocats d’affaires !

M. François Baroin, ministre. Mais, de grâce, ne nous engageons pas sur une voie qui nous mènerait beaucoup trop loin, ce que nous regretterions, alors qu’un consensus est à portée de main,…

M. Pierre Gosnat. Bla, bla, bla !

M. François Baroin, ministre. …et que l’on peut parvenir à une évolution respectable, pour les responsables politiques comme pour toute la haute fonction publique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.). »

jeudi 17 février 2011

Népotisme, encore et toujours...


Népotisme quand tu nous tiens. Pas freiné par l'illégalité de la nomination de François Pérol à la tête du groupe BPCE, pas plus que freiné par l'ascension stoppée net sous la pression populaire du prince Jean, la Sarkozye cultive le népotisme avec une rigueur qui ferait passer les Borgia pour une sainte famille. En pleine tourmente concernant les récents dérapages sur l'usage des jets privées et autres conflits d'intérêts, François Fillon vient de nommer le fils d'un certain Jean Tiberi, contrôleur général économique et financier de première classe et ce, alors même que la commission ayant examiné son dossier avait rendu un avis négatif à son sujet. Mais qu'à cela ne tienne, nomination comme contrôleur général économique et financier a-t-il été décidé, nomination il y a aura ! Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que le gouvernement piétine ouvertement les règles en matière de nomination.

Justice, justice.
Déjà, lors des premiers jours, les choses ne sont pas allés pour le mieux. Lors de ses premiers pas à la Chancellerie, Rachida Dati avait entrepris de changer tous les procureurs généraux ou au moins tous ceux qui n'étaient pas dans la ligne. Le népotisme était tellement présent que lors de leurs assemblées générales, les syndicats de magistrats en riaient au travers de petites scènettes au cours desquelles ils se posaient la question suivante :
« Que faut-il comme qualité pour être nommé HC [hors catégorie] ?
Réponse A : Avoir un bon dossier.
Réponse B : Avoir de l'expérience.
Réponse C : Être l'ami de Rachida Dati.
Réponse D : Obi-Wan Kenobi.»

Je vous laisse deviner la réponse.

Dans la continuité de ce mouvement, donc, deux questions parlementaires ont été posées par l'opposition lors de la traditionnelle séance de questions au gouvernement. Les voici.

« Nomination dans le corps du contrôle général économique et financier

M. le président. La parole est à M. Jean Mallot, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Jean Mallot. Monsieur le Premier ministre, tous les moyens sont-ils bons pour parvenir à ses fins ? Vous ambitionnez, dit-on, de vous faire élire député de Paris en 2012. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pour préparer le terrain, vous ne reculez devant rien. Le Président de la République avait voulu faire nommer son fils à la tête de l’établissement public pour l’aménagement de La Défense. (Même mouvement.)

M. Lucien Degauchy. C’est nul !

M. Jean Mallot. Vous venez de nommer par décret le fils de l’ancien maire de Paris, M. Dominique Tiberi, contrôleur général économique et financier de première classe. (Rires sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

La commission d’aptitude avait pourtant estimé à l’unanimité que M. Tiberi n’était pas apte à exercer ces fonctions. Vous n’en avez pas tenu compte. L’audition de l’intéressé par la commission avait pourtant même fait apparaître « l’absence de connaissances par l’intéressé des missions du corps et des compétences que requièrent ces fonctions ». Ça ne s’invente pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Pensiez-vous vraiment que cela passerait inaperçu ? Entre l’inconscience et le cynisme, on hésite ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Dino Cinieri. Marseille !

M. Jean Mallot. Dois-je vous rappeler les propos du candidat Nicolas Sarkozy en 2007 ? « La démocratie irréprochable, ce n’est pas une démocratie où les nominations se décident en fonction des connivences et des amitiés, mais en fonction des compétences. »

M. Dino Cinieri. Marseille !

M. Jean Mallot. Je cite toujours : « Le fait du prince n’est pas compatible avec la République irréprochable. » Avec vous, ce n’est pas la République irréprochable : c’est la République des passe-droits !

M. Bruno Le Roux. Ils ne reculent devant rien !

M. Jean Mallot. Dans notre pays, où les inégalités s’accentuent et où le sentiment d’injustice va croissant, votre manière de gouverner est en cause. Au moment où vous prétendez vouloir réglementer les conflits d’intérêts, je vous le demande, monsieur le Premier ministre : qui va vous croire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, j’ai envie de vous dire : pas vous, pas ça, pas ici, pas maintenant ! (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Ce corps de contrôle existe depuis 1984. C’est Laurent Fabius qui l’a mis en place. Je tiens à votre disposition la liste de tous les familiers du pouvoir de l’époque qui y ont exercé des responsabilités, avec le sens de l’État, et personne ne vous a condamnés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Glavany. Quel aveu !

M. François Baroin, ministre. Nous arrivons aux affaires en 1986, avec une première loi qui encadre plus strictement les modalités. Vous revenez aux affaires. Je tiens à votre disposition la deuxième liste des nominations au contrôle général économique et financier. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Revenus au pouvoir, nous rédigeons en 1994 une nouvelle loi de transparence, qui instaure l’obligation de publier des avis de la commission chargée d’examiner les candidatures. Vous revenez aux affaires : je tiens à votre disposition la troisième liste des gens que vous avez nommés dans ce corps de contrôle. Si vous voulez vraiment laver plus blanc, je vous renvoie à la situation des vingt-cinq dernières années ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrick Bloche. Répondez à la question !

M. François Baroin, ministre. Une évolution a incontestablement eu lieu. Le Gouvernement n’est pas lié pas l’avis de la commission ; il a l’obligation de le publier, ce qui a été fait il y a quelques semaines, au moment de la nomination en conseil des ministres. Cet avis est au Journal officiel. Il y a là, me semble-t-il, de quoi prendre la mesure de l’évolution, depuis 2007, de la transparence, de la rigueur et de la publicité générale.

Permettez-moi de signaler, pour conclure, que je ne vous ai pas entendu protester de la même manière lorsque, dans un esprit d’équilibre républicain, ont été nommés des gens comme M. Migaud à la tête de la Cour des comptes (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), M. Cahuzac à la tête de votre commission des finances ou M. Charasse au Conseil constitutionnel. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.) »



Puis une autre, plus générale, sur les conflits d'intérêts :
« Conflits d’intérêts

M. le président. La parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Olivier Dussopt. Monsieur le Premier ministre, il y a quelques semaines, certains de mes collègues vous ont interrogé sur la question des conflits d’intérêts et sur les rapports entre le pouvoir et les grandes fortunes de notre pays ; Christian Eckert avait évoqué une réunion du « premier cercle », ce club des généreux donateurs de l’UMP, (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP) réunion au cours de laquelle le Président de la République avait promis la suppression de l’ISF. Cette promesse au moins, il semble vouloir la tenir, et même contre l’avis de certains collègues de la majorité puisqu’il a répété hier sa volonté de supprimer l’ISF.

Monsieur le Premier ministre, sur d’autres sujets, à propos des errements de votre ministre des affaires étrangères et de toutes les affaires qui les ont précédées, nous avons dit que nous sommes passés de la promesse d’une République irréprochable à une complaisance coupable vis-à-vis des puissants et des dictatures. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. André Wojciechowski. Oh la la !

M. Olivier Dussopt. Si vous nous confirmez aujourd’hui la suppression de l’impôt sur la fortune, vous ajouterez l’indécence à la complaisance.

Les Français souffrent et paient les erreurs de votre politique économique : erreurs dans la gestion de la crise, erreurs et injustices dans vos choix, avec un chômage au plus haut, 15 % des Français sous le seuil de pauvreté, des prix qui augmentent sans cesse – le gaz, l’électricité, les transports et j’en passe –, des aides sociales qui diminuent, des associations caritatives débordées, et le rapport de la fondation Abbé Pierre qui souligne la crise sociale que traverse notre pays.

M. André Wojciechowski. Vous n’avez pas fait mieux !

M. Olivier Dussopt. Alors que, dans le même temps, vous-même et votre gouvernement semblez vous complaire dans un décalage indécent entre voyages inopportuns et affairisme, entre nominations de complaisance à tous les étages de la République et provocation gratuite. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Plutôt que de répondre aux attentes de nos concitoyens, le Président de la République, fidèle à son image de Président des riches, décrète que la priorité est de baisser l’impôt sur les grandes fortunes !

Vous renvoyez l’image d’un pouvoir sourd aux aspirations de justice sociale, obstiné dans la mise en oeuvre d’une politique injuste. Baisser l’impôt sur les grandes fortunes, est-ce vraiment votre priorité ? Ne nous dites pas que les socialistes allemands l’ont fait : c’est Helmut Kohl, Chancelier de droite, qui l’avait décidé en 1997.

Ma question est très simple : allez-vous faire encore un cadeau fiscal supplémentaire aux ménages les plus favorisés de notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs du groupe GDR.)

M. Christian Paul. Excellente question !

M. le président. La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur Dussopt, retenons ensemble que l’exemple de l’Allemagne et de Helmut Kohl n’est pas pertinent et prenons alors l’exemple espagnol : M. Zapatero est socialiste…

M. Jacques Desallangre. Mais oui, autant que moi !

M. François Baroin, ministre. …et il a supprimé l’impôt sur les grandes fortunes. (« Eh oui ! » et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Assumez-le et reconnaissez que cette réflexion n’est ni de gauche ni de droite. C’est une réflexion qui doit être partagée pour atteindre le double objectif de cette réforme : celui de justice sociale, que nous partageons tous, et celui de compétitivité économique, dont je veux croire qu’une partie de l’opposition, qui a exercé les responsabilités, le poursuit également.

M. Philippe Plisson. Langue de bois !

M. François Baroin, ministre. Je vous remercie d’assurer ainsi, à travers votre question, la promotion des travaux que nous pilotons, sous l’autorité du Premier ministre, avec les membres de la majorité. Depuis plusieurs semaines en effet, nous travaillons sur une photographie précise de la constitution du patrimoine des Français, sur le droit comparé des fiscalités européennes, sur les éléments comparatifs de la fiscalité française et sur son évolution, ce qui dit beaucoup d’ailleurs sur la réalité d’un pays.

Ces travaux vont se poursuivre selon un calendrier qui est maîtrisé : le texte sera soumis au Conseil d’État à la fin du mois d’avril, et devrait être présenté en conseil des ministres dans la première quinzaine de mai. Le projet de loi devra alors être équilibré et ne pas s’éloigner de ce double objectif. Pour l’heure, aucun choix n’est privilégié par rapport à un autre : tous les scénarios sont toujours en discussion. Nous dirons, début mars, quelles sont les mesures que nous ne retenons pas. Ce qui nous laissera encore un mois et demi pour peaufiner le texte et s’adapter à l’équilibre du travail législatif. Cela nous permettra, comme le Président de la République s’y était engagé, comme le Premier ministre l’a réaffirmé à de nombreuses reprises, d’avoir, au mois de juin prochain, un débat utile pour notre économie et utile pour une certaine idée de la justice sociale. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) »

samedi 12 février 2011

Mourbarak parti. Quel avenir pour l'Égypte ?

Vendredi 11 Février 2011, 17h, un moment marqué d'une pierre blanche dans l'histoire de l'Égypte. Lors d'une courte allocution télévisée, le vice-président Omar Souleymane a annoncé que le président de la République d'Égypte, Hosni Moubarak démissionnait de ses fonctions.
La veille au cours d'une allocution télévisée, Hosni Moubarak avait déjà amorcé le mouvement en annonçant le transfert d'une bonne partie de ses pouvoirs au vice-président Souleymane.


Une porte de sortie honorable.
Au cours de la journée de vendredi, la question n'était plus de savoir si Moubarak allait partir mais bel et bien de lui trouver une porte de sortie honorable afin d'éviter que la situation ne dégénère. Au cœur de cette transition, l'armée égyptienne. Depuis Nasser, son rôle est prépondérant. Tous les dirigeants égyptiens sont issu de ses rangs d'Anouar El-Sadate, Moubarak bien sur mais aussi le vice-président Souleymane. Le président du Conseil militaire suprême de l'armée, à qui le pouvoir a été confié, est le ministre de la Défense pilier du régime Moubarak. Bref, tous ceux qui comptent viennent de l'armée.

L'armée égyptienne qui a aussi joué un rôle majeur dans la « Révolution » en ne tirant pas sur la foule, mais en contenant les manifestants et en assurant leur sécurité. L'armée a donc une place très spéciale dans le pays et son rôle sera décisif. Déjà, elle a annoncé qu'elle ne confisquerait pas le pouvoir et garantirait la transition démocratique du pays. Mais justement quelle transition ?


Transition démocratique ou transition théocratique ?
Dans l'immédiat, l'armée n'a pas dissous l'exécutif actuel pour une bonne raison, il est, ainsi que précisé plus haut, presque intégralement composé de personnes qui sont issus de l'armée. L'autre explication tiendrait au maintien d'une certaine stabilité, essentielle dans cette période troublée. Dans l'immédiat donc, l'armée est chargée de « gérer les affaires courantes », autrement assurer la continuité de l'État. Elle devra ensuite garantir l'organisation d'élections « libres et démocratiques ». Le problème est de savoir qui sera à même d'assurer le pouvoir et de gouverner dans l'après Moubarak.

Les frères musulmans, interdits et dissous sous Moubarak existent toujours mais leur objectif est bien différent de celui de l'ancien président. Alliés objectif de la prise de pouvoir de Nasser, ces alliés de circonstance s'en sont bien vite désolidarisé car ils ne voulaient pas un État laïc mais une théocratie. Objectif depuis inchangé. Face à cela, aucune alternative sérieuse ou crédible ne s'est faite jour. El Baradeï, très connu à l'extérieur de l'Égypte et ancien prix Nobel de la paix, ne jouit que de peu de crédit au sein de la population égyptienne pour qui il reste en grande partie, un inconnu. Les autres options n'existent pas vraiment puisque Moubarak avait tout fait pour étouffer une quelconque opposition. Le risque d'avoir une théocratie est donc réel même s'il est probablement surestimé par l'Occident.


Les réactions étrangères.
Suite à ce départ, les réactions étrangères furent nombreuses. Les dirigeants européens se sont félicités de la transition démocratique. Dans des termes choisis, Nicolas Sarkozy et ses autres homologues ont félicité le peuple égyptien pour son courage et son désir de liberté.

En Israël, c'est la méfiance qui prédomine. Somme toute, à Tel-Aviv, on se satisfaisait fort bien de ce président, certes autoritaire, mais qui avait su maintenir coûte que coûte la paix entre l'Égypte et Israël.

La paix au Proche-orient, c'est l'enjeu crucial à l'aune duquel la Révolution égyptienne sera évaluée. Les premières déclarations américaines appelaient d'ailleurs, l'Égypte à respecter les accords de paix signés avec l'État hébreu.

Il est ainsi particulièrement intéressant de voir dans quels termes, Barack Obama s'est exprimé suite à la démission d'Hosni Moubarak. Très vindicatif depuis le début des évènements en Égypte, la diplomatie américaine a dû se retenir un peu face au mécontentement que suscitaient ses déclarations parmi les dirigeants arabes qui ont depuis longtemps sous-traités leur sécurité à l'oncle Sam en échange de leur coopération et qui apprécient peu de se voir lâcher par ceux-là même qu'ils ont soutenu, la plupart du temps contre leurs opinions publiques.

Dans sa déclaration donc, Barack Obama emploie des mots forts et se montre volontiers lyrique mais à aucun moment, ne dit de mauvais mot contre Hosni Moubarak. Signe que même dans les mauvais moments, l'Amérique reconnait le rôle important de l'ancien président de la stabilité politique au Moyen-Orient.


Conclusion.
Au final, tout change et rien ne change. L'armée égyptienne garde un rôle prépondérant, les démocraties occidentales, prudentes, souhaitent avant tout éviter que le Moyen-Orient ne s'embrase. Israël, plus inquiet que jamais, garde la main sur le M-16 et le doigt pas loin du bouton rouge. Les dirigeants des autres pays arabes, pas rassurés pour un sou par l'évolution de la situation égyptienne hésitent entre durcir le ton comme en Algérie ou lâcher du lest comme en Jordanie afin de se maintenir au pouvoir. En somme, dans cette région plus qu'ailleurs, rien n'est simple et bien malin est celui qui peut prédire l'évolution de la région. Une chose est néanmoins certaine, plus rien ne sera comme avant et un vent frais de liberté souffle sur une région qui en a été trop longtemps privée, ce qui n'est pas une mauvaise chose.

vendredi 11 février 2011

Paroles... Paroles...


Ce jeudi 10 Février 2011, Nicolas Sarkozy intervenait sur TF1 dans « Paroles de français ».

Un format sur mesure.
Cette émission taillée pour le chef de l'État sur la plus grande chaine privée de France a réuni 8,2 millions de téléspectateurs selon Médiamétrie. Un score honorable mais pas exceptionnel puisque l'émission a eu lieu un jeudi soir, soit le jour où les audiences sont les plus fortes et en première partie de soirée, case télévisuelle la plus favorable de la semaine à la télévision.

Le maître de cérémonie ensuite, ou passeur de plats, était Jean-Pierre Pernault dont l'enthousiasme pour le président de la République n'est plus à démontrer. Le panel de français ensuite, 9 français soigneusement choisis pour permettre au président de la République de dérouler son discours. Ainsi, une pharmacienne de Nice pas dupe pour un sou qui savait pertinnemment qu'elle avait été invité car s'étant faite braquée 4 fois en 1 mois et demi. Ou, encore cette jeune chômeuse du Valenciennois choisi pour ses difficultés à retrouver un emploi. Mais aussi ce retraité de Bapaume (Pas de Calais) dont l'épouse, malade, fait face à des difficultés en matière de dépendance.

Mais, malgré toutes ces précautions, l'émission n'a pas vraiment atteint ses buts.


Déçus...
De toutes les réactions qui arrivent, un mot revient : déçu.
Les 9 français invités sur le plateau, déçus de la surdité du président de la République qu'ils ont trouvé peu à l'écoute de leurs problèmes et plus préoccupé par le fait d'expliquer ses idées aux français sur le plateau puis à leur présenter son épouse que par trouver ou proposer des solutions à leurs difficultés. Pour eux, il est évident qu'en 2011, le président ne fera rien pour résoudre leurs difficultés malgré la volonté affichée.

Même son de cloche du côté des courageux téléspectateurs qui ont suivi l'intégralité de l'intervention présidentielle. De leur côté, c'est surtout la longueur de l'intervention présidentielle qui les a marqués. Aucune annonce dans les propos du président, si ce n'est une rallonge de 500 millions € pour lutter contre le chômage de longue durée via des contrats aidés.

Du côté des partis politiques, hormis l'UMP qui a forcément trouvé l'intervention présidentielle formidable, les réactions pointent aussi l'interminable intervention présidentielle et l'ennui qu'elle a suscité. Signe de ce manque d'intérêt, la réaction de Marielle de Sarnez qui s'est dit plus intéressée par le discours en direct d'Hosni Moubarak à la télévision égyptienne que par l'émission consacré au président de la République. Tout un symbole !


Que retenir.
De cette intervention, les différents acteurs n'attendaient pas grand chose et le moins que l'on puisse dire, c'est que le président a plus que répondu à leurs attentes. Dans une longue et ennuyeuse intervention où les français présents pour l'interroger, bien que soigneusement choisis n'ont pas vraiment pu en placer une, le président a surtout montré qu'il ne comptait pas faire grand-chose pour eux en 2011. Ce dernier avait pourtant promis que 2011 ne serait pas une année blanche en termes législatifs.

Si on y regarde de plus près, hormis les projets lancées en 2010 ou prévus de longue date comme la LOPPSI 2 ou la révision de la loi sur la bioéthique, l'agenda n'est pas vraiment excitant. Ah si, une chose se distingue par rapport à ce qui était prévu. Fait sans précédent, la plupart des magistrats sont dans « mouvement collectif de cessation de travail ». Professions plus conservatrices et respectueuses de l'ordre établi, les professionnels du monde judiciaire exprime cette fois leur ras-le-bol face au manque de moyens dont souffre la justice et la mise en cause de leur responsabilité.

Dans ce contexte, on peut toutefois se poser une question : quand le mouvement démocratique au Afrique du Nord s'étendra-t-il à la France ?

jeudi 10 février 2011

Tribune de Guy Verhofstadt sur la Gouvernance européenne.

Dans son édition du mercredi 09 Février 2011, le quotidien économique « Les Échos » publie une tribune de Guy Verhofstadt, ancien premier ministre belge et président du groupe ADLE au Parlement européen.

Dans ce texte, Guy Verhofstadt défend l'idée que la France et l'Allemagne ne doivent plus faire cavalier seuls en matière de gouvernance européenne et se doivent elles aussi respecter le traité de Lisbonne. Il insiste aussi sur le fait que le couple franco-allemand ne doit pas seulement être source de propositions mais aussi qu'il doit cesser d'être un frein pour l'Europe quand ses intérêts sont en jeu.

Il démontre encore une fois que l'Europe est un intérêt supérieur à la somme des intérêts individuels. Voici sa tribune :

« Gouvernance européenne : à la recherche du temps perdu

Ainsi donc, vendredi dernier, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy se sont poliment mais fermement vu opposer une fin de non-recevoir par leurs homologues du Conseil européen à leur projet de pacte pour la compétitivité. Le contraire aurait été surprenant ! Qui pouvait imaginer que des chefs d'Etat et de gouvernement allaient se faire dicter leur politique économique par un directoire franco-allemand, et pour tout dire surtout allemand, le document initial étant écrit dans la langue de Goethe ? Sur le fond, pourtant, c'est bien la première fois qu'on sort enfin de l'hypocrisie pour dire les choses clairement. Oui, une politique économique commune doit reposer sur des indicateurs partagés de compétitivité (coût du travail, âge de la retraite, fiscalité), sur la stabilité budgétaire et sur l'investissement en matière de recherche, d'éducation et d'infrastructure. Il aura fallu attendre un an après le début de la crise obligataire et les asymétries qu'elle a révélées dans le développement économique et social de la zone euro pour que ces évidences apparaissent dans un document officiel. De ce point de vue, je dis « merci Angela, merci Nicolas ». Mais j'ajoute aussitôt : « Mais pourquoi avez-vous gâché l'occasion d'ouvrir sérieusement le débat ? »

Car tout est une question de méthode. Effectivement, nous devons aller vers une politique économique commune. Mais l'Union européenne est un Etat de droit, dont tous les membres sont représentés à proportion au Conseil et au Parlement européens, et dispose d'un commissaire à la Commission européenne. Je sais qu'à Berlin ou à Paris on méprise la Commission et le Parlement, mais figurez-vous que dans la plupart des autres Etats membres le contrat de mariage avec l'UE repose sur cette prémisse : il existe des institutions européennes, et c'est à elles qu'il incombe de proposer et de décider. C'est la règle du jeu, et si l'Allemagne et la France se sont fait rabrouer, c'est moins pour les idées qu'elles avançaient que pour leur manière cavalière de violer la lettre et l'esprit du traité de Lisbonne.

« Bien sûr, me dira-t-on, mais où sont les propositions de la Commission européenne ? » Certes, j'ai souvent moi-même condamné l'inertie de José Manuel Barroso, imposé à cette fonction, dois-je le rappeler, par la France et l'Allemagne. C'est vrai que pendant longtemps ce dernier a bridé d'avance toutes les initiatives par crainte qu'elles ne se heurtent à l'opposition des « grands pays ». Reste que, peu à peu, sous la pression notamment du Parlement européen, la Commission fait preuve de quelques fulgurances. Qui a proposé la stratégie UE 2020 pour régler le problème de la compétitivité européenne ? La Commission. Et qui fait en sorte qu'aucun des indicateurs de compétitivité ne soit contraignant ? La France et l'Allemagne ! Qui a proposé une harmonisation de l'assiette de l'impôt sur les sociétés ? La Commission, dès 2006. Et qui se décide enfin à prendre au sérieux ce débat ? La France et l'Allemagne ! Qui propose une réforme ambitieuse du Pacte de stabilité avec des sanctions automatiques contre les mauvais élèves budgétaires ? La Commission. Et qui s'acharne à affaiblir le dispositif ? La France et l'Allemagne ! Si la France et l'Allemagne, mais d'autres Etats membres ne sont pas non plus exempts de critiques, avaient laissé nos institutions communes travailler, nous n'en serions sans doute plus au lancement du débat sur la gouvernance économique, mais déjà en pleine négociation.

Cette constance dans la recherche du temps perdu a trouvé lors de ce Conseil européen une nouvelle illustration avec la myopie franco-allemande sur la réalité de la crise obligataire. La création d'un marché obligataire unique est un impératif. Les marchés ne veulent en effet pas moins d'Europe, mais plus d'Europe, c'est-à-dire de la visibilité pour la sécurité de leurs investissements. Ainsi que les démocrates et libéraux européens le réclament à cor et à cri depuis des mois, le Fonds européen de stabilité financière doit s'appuyer sur des euro-obligations mutualisant les dettes souveraines des Etats membres de la zone euro dans la limite des critères d'endettement prévu par le traité. Que répondent la France et l'Allemagne en substance ? « On verra. » Cette stratégie de joueur de poker est mortifère car les traders sont de bien meilleurs joueurs que les hauts fonctionnaires des ministères des Finances. Nous proposons, à l'occasion du grand débat qui va s'ouvrir sur l'avenir du budget européen, que la Banque européenne d'investissement puisse émettre des obligations de projet, permettant aux citoyens européens d'investir et de parier sur le développement de notre bien commun : l'Europe.

Guy Verhofstadt, ancien Premier ministre belge, préside le groupe de l'Alliance des démocrates et libéraux pour l'Europe au Parlement européen. »

mercredi 9 février 2011

La justice au menu.


Mardi 8 Février 2010, séance de questions au gouvernement. Alors que tout le monde attendait un feu nourri sur les déplacements en jet de Michèle Alliot-Marie, c'est la justice qui a été au centre de l'attention avec pas moins de 4 questions posées au gouvernement sur le sujet dont 3 de l'opposition. Voici ces questions. Leur lecture est particulièrement éclairante dans le cadre du débat surréaliste qui se déroule actuellement sous nos yeux.


Question de M. Philippe Houillon (UMP) sur la Responsabilité des magistrats.

M. le président. La parole est à M. Philippe Houillon, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Philippe Houillon. Monsieur le ministre de la justice, le 18 janvier dernier, une jeune fille, Laëtitia, trouvait la mort, victime des actes de barbarie les plus atroces, présumés commis par un homme de trente et un ans, déjà condamné quinze fois et considéré comme très dangereux par son propre entourage.

L’extrême émotion et la douleur indélébile de sa famille, plutôt que de susciter de la part des acteurs politiques et judiciaires une réflexion respectueuse,…

M. Roland Muzeau. Qui n’est pas respectueux ? Le Président de la République !

M. Philippe Houillon. …laissent place, aujourd’hui, à une simple grève, parce que le chef de l’État, arbitre des institutions, après avoir reçu la famille de Laëtitia et partagé sa douleur, a indiqué – sans d’ailleurs désigner spécifiquement les magistrats, et encore moins tous les magistrats, comme seul périmètre des responsabilités – qu’il pouvait y avoir faute et qu’elle serait alors sanctionnée.

Il était dans son rôle. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) C’est la règle en toute matière et pour tout le monde ;on le constate tous les jours. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Il est vrai que la question de la responsabilité des magistrats fait débat depuis longtemps, sans être réellement tranchée, ce qui suscite l’incompréhension de nos concitoyens.

M. Jean Glavany. Et la responsabilité politique ?

M. Philippe Houillon. Pour autant, les magistrats se sont manifestement sentis collectivement atteints et expriment même un sentiment d’injustice qu’il nous faut entendre, à la fois parce qu’ils assument avec beaucoup de conscience un rôle de plus en plus difficile, dont l’honnêteté impose de dire qu’ils n’en ont pas toujours les moyens, parce qu’il n’est pas sain que des incompréhensions, voire des divisions, s’installent entre les institutions de la République, ce que nos concitoyens ne peuvent comprendre, et enfin parce que la question de la grande récidive et des grands prédateurs se réglera plus sûrement par le dialogue des acteurs plutôt que par de nouvelles lois.

Ma question est double. Premièrement, les enquêtes diligentées ont-elles permis ou non d’apprécier si des fautes, d’où qu’elles viennent, ont été commises dans la gestion de la situation de Tony Meilhon ? Deuxièmement, quelles initiatives envisagez-vous de prendre pour rétablir l’indispensable dialogue avec l’institution judiciaire ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Monsieur le député Houillon, ainsi que vous venez de le rappeler, le meurtre de Laëtitia, le 19 janvier dernier, impose à tous, élus – fonctionnaires et magistrats – de faire le point et de regarder loyalement où en sont les choses.

Le Président de la République est intervenu en tant que garant du fonctionnement régulier de nos institutions (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC), et il a eu raison de le faire. Il était porteur de l’émotion suscitée dans l’opinion publique par ce terrible meurtre (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR), et il a droit aussi à sa part d’humanité.

Si le ministre de l’intérieur et moi-même avons diligenté trois enquêtes, c’est parce qu’il y a eu des dysfonctionnements. Nous attendrons le résultat de ces enquêtes pour juger s’il y a lieu de saisir les instances disciplinaires. Si le dysfonctionnement a été collectif, nous devrons prendre les mesures nécessaires pour modifier le mode de fonctionnement, les méthodes de travail et pour faire en sorte, comme le Premier ministre l’a annoncé hier, que les moyens soient suffisants.

Dès la semaine prochaine, lorsque ces rapports m’auront été remis, j’inviterai les organisations professionnelles et syndicales à venir en discuter avec moi à la Chancellerie, afin de bâtir un nouveau climat de respect et de discussion, pour que le service public de la justice soit le meilleur possible pour les Français. C’est ce qu’ils attendent de nous. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)


Question de M. Jean-Marc Ayrault (PS) sur le Fonctionnement des institutions.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, nous avons la République en partage, elle est notre héritage commun (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), elle est notre fierté et notre identité dans le monde entier. Lorsque la République est malmenée, c’est l’image de la France qui est abîmée, aux yeux du monde comme à nos propres yeux.

M. Richard Mallié. Alors pourquoi mettez-vous la pagaille ?

M. Jean-Marc Ayrault. Le Président de la République étant le garant de nos institutions, c’est à lui qu’il revient, au premier chef, d’assurer et d’assumer le fonctionnement régulier des pouvoirs publics. Or, aujourd’hui, c’est précisément le chef de l’État qui, par ses propos, alimente les polémiques, la division et la paralysie de nos institutions. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Huées sur les bancs du groupe UMP.)

Toutes les fonctions régaliennes de l’État sont en crise. La façon dont est conduite la réforme des armées n’est plus acceptée par les militaires. (« Ce n’est pas vrai ! » sur les bancs du groupe UMP.) Les CRS se mettent en grève, les magistrats, les policiers, les gendarmes, les agents de probation, les personnels pénitentiaires, expriment leur colère, et les diplomates sortent de leur réserve pour signifier leur malaise.

Le Président de la République, élu pour assurer l’autorité de l’État, est en train de la détruire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Monsieur le Premier ministre, qui est excessif ? Le Président, ou ceux qui manifestent ? Nous connaissons déjà votre réponse, c’est toujours la faute des autres : les fonctionnaires, les magistrats, les journalistes, l’opposition !

M. Guy Teissier. Les socialistes !

M. Jean-Marc Ayrault. Pourtant, force est de constater que l’exemplarité des comportements n’est plus de mise aujourd’hui à la tête de l’État. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le Premier ministre, la grandeur de votre fonction est d’assumer les pouvoirs que les Français vous ont confiés et pour lesquels vous devez leur rendre des comptes. Qu’allez-vous faire pour mettre un terme à la situation actuelle et remettre enfin la République à l’endroit ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.

M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président Ayrault, la République est notre bien commun et il nous appartient à tous de faire respecter l’autorité de l’État. Cela ne consiste pas à fuir les responsabilités, à refuser de regarder les réalités en face.

Le martyre de Laëtitia a ému toute la France, et je veux dire, avant toute chose, que c’était le devoir du Président de la République que de se faire l’écho de cette émotion, avec cœur ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

On peut avoir des débats sur les responsabilités, sur la question des moyens de la justice, mais je ne comprends pas qu’au sujet de cette affaire, l’ensemble des acteurs ne fassent pas preuve d’une compassion unanime à l’égard de la victime ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Il suffit d’un mot pour exprimer sa compassion, mais je ne l’ai pas entendu ! (Les députés du groupe SRC se lèvent et continuent à protester.)

Pour ce qui est du fonctionnement de la justice, le présumé coupable, du moins le principal auteur présumé, qui a été mis en examen dans cette affaire, est bien connu de la justice et a passé de longues années en prison. Il était prévu qu’il soit suivi à sa sortie, ce qui n’a pas été le cas. C’est un dysfonctionnement, personne ne peut le nier. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Patrick Bloche. La justice n’a pas assez de moyens !

M. François Fillon, Premier ministre. Nous avons diligenté des enquêtes qui diront si les fautes commises sont des fautes personnelles ou des fautes liées à l’organisation de notre système judiciaire. Chacun doit assumer ses responsabilités. S’il y a eu des fautes personnelles, elles doivent être sanctionnées ; s’il y a des fautes dans l’organisation même de l’appareil judiciaire, alors c’est au Gouvernement, au garde des sceaux, au ministre de l’intérieur et à la justice de proposer les corrections pour y remédier.

M. Daniel Vaillant. C’est votre faute !

M. François Fillon, Premier ministre. C’est d’ailleurs tout le sens du communiqué publié en commun, il y a quelques jours, par le ministre de la justice et le ministre de l’intérieur, qui donnait les premières pistes des mesures à prendre pour que cette situation ne se reproduise pas.

Je connais parfaitement la lourdeur de la tâche des magistrats (« Ils manquent de moyens ! » sur les bancs du groupe SRC) et je sais les difficultés auxquelles ils sont confrontés. Sur la question des moyens, je vous invite à faire preuve de modestie, car, lorsque vous étiez aux affaires, vous n’avez pas donné les moyens nécessaires à la justice. (« Qu’avez-vous fait en neuf ans ? » sur les bancs du groupe SRC.) Nous essayons de rattraper le retard, mais il y a beaucoup à faire. C’est une responsabilité collective !

La lourdeur de la mission des magistrats, leur responsabilité écrasante, ne doit pas conduire, comme c’est le cas aujourd’hui, à ce que l’ensemble de nos concitoyens soient victimes de leur mouvement de protestation. (Les députés du groupe UMP se lèvent et applaudissent longuement.)


Question de M. Jean-Yves Le Bouillonnec (PS) sur le Fonctionnement des institutions.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le Premier ministre, ce n’est pas à vous de juger de la compassion éprouvée par chaque Français à l’occasion de l’assassinat de la petite Laëtitia. Vos paroles à notre égard sont injustes et insultantes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Les propos récents du Président de la République n’ont pas seulement porté atteinte à l’organisation des institutions que garantit la Constitution ; ils ne tentaient pas seulement de dissimuler maladroitement ses échecs. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Les propos du Président de la République constituent, aux yeux de ceux qu’il vise mais aussi aux yeux de tous les Français attachés à notre démocratie, une véritable déstabilisation de l’État. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC ainsi que sur plusieurs bancs du groupe GDR. — Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Le président de la République est pourtant le gardien de nos institutions républicaines et démocratiques !

Dans un État de droit, peut-on concevoir que le chef de l’État manque à ce point d’estime envers ceux qui se voient confier le maintien de l’ordre public, l’application de la loi et l’exécution des décisions de justice ? (Mêmes mouvements.)

Nous courons le risque d’une perte de confiance de nos concitoyens envers les institutions, envers l’État, alors même qu’en cette période de crise, nous avons tous besoin de cette confiance. Peut-on imaginer que le Président de la République ne mesure pas cet enjeu, qui constitue pourtant la première des responsabilités que le suffrage universel lui a confiées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Notre pays ne peut se construire par l’affrontement permanent, par les divisions, par l’exaspération des contradictions d’intérêts inévitables dans tout corps social. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Il en va de l’unité de la nation, de la paix sociale et du pacte républicain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC ainsi que plusieurs bancs du groupe GDR.)

Monsieur le Premier ministre, ne pensez-vous pas que ce dont notre pays a besoin – pour lui-même, comme pour tous les autres qui le regardent aujourd’hui avec plus de désespoir que d’envie (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) – c’est que le Président de la République soit par ses actes, par ses paroles, par sa capacité à tendre la main, l’incarnation d’un État de droit ? (Mmes et MM. les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent longuement. — Vives protestations et huées sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Je veux d’abord vous demander d’excuser M. le Premier ministre, qui a dû quitter cet hémicycle pour se rendre à Annecy. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Alain Néri. C’est nul !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Monsieur Le Bouillonnec, comme vous l’avez dit, comme nous le pensons tous, le Président de la République est le garant du fonctionnement régulier des pouvoirs publics.

Le Président de la République est dans son rôle lorsqu’il intervient pour rappeler des principes, et notamment le principe de responsabilité qui doit guider l’ensemble des fonctionnaires, y compris les magistrats. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Le Président de la République est aussi dans son rôle lorsqu’il porte l’émotion du pays face à un meurtre affreux. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Nous devons tous, élus, responsables, fonctionnaires, magistrats, regarder loyalement ce qui s’est passé et en tirer tous les enseignements.

M. Frédéric Cuvillier. Vous êtes en train de vous prendre les pieds dans le tapis !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Nous devrons examiner les résultats des enquêtes que le ministre de l’intérieur et moi-même avons diligentées : nous avons tous à y gagner, la République a tout à y gagner.

C’est ainsi que nous pourrons, ensemble, retrouver le chemin de la sérénité (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) qui fait aujourd’hui défaut.

Je veux faire appel au devoir de responsabilité de chacun dans ses fonctions. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Bruno Le Roux. Adressez-vous au Président de la République !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Le travail des magistrats est difficile, pénible, je le sais bien. Je veux dire simplement… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC, applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Merci.


Question de M. Dominique Raimbourg(PS) sur la Justice.

M. le président. La parole est à M. Dominique Raimbourg, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Dominique Raimbourg. Ma question s’adressait initialement à M. le Premier ministre. Elle s’adresse désormais à M. le garde des sceaux.

Le sort horrible qu’a connu la jeune Laëtitia dans la nuit du 19 janvier à Pornic nous a serré le cœur à tous. Cependant, dès le 3 février, à Orléans, M. le Président de la République, sans attendre les rapports des trois inspections en cours, sans prendre les précautions oratoires qui ont été celles de M. le Premier ministre et qui ont été aujourd’hui les vôtres, monsieur le garde des sceaux, évoquait des « fautes » et des « sanctions ».

M. Alain Gest. S’il y avait faute !

M. Dominique Raimbourg. S’il y avait eu faute.

M. Dominique Dord. Respectez ce qui a été dit.

M. Dominique Raimbourg. C’était oublier un peu vite que les effectifs policiers ont été victimes de la RGPP. C’était oublier un peu vite que les agents de probation ont chacun 135 dossiers à traiter. C’était oublier un peu vite qu’à Nantes le quatrième poste de juge d’application des peines n’était pas pourvu. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) C’était oublier un peu vite que notre pays se classe au trente-septième rang parmi les pays européens pour la part de PIB consacrée à la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Dominique Dord. Ce n’est pas la réalité.

M. Dominique Raimbourg. Ulcérés par cette situation, les magistrats, les greffiers, les agents de probation se sont lancés dans un mouvement de protestation. Ils ont reçu le soutien des policiers, le soutien des avocats, le soutien des agents de la pénitentiaire.

Ainsi, M. le Président de la République, qui se vantait, au printemps 2007, de régler la question des multirécidivistes dès l’été, voit à son encontre s’unir la totalité des agents de la chaîne pénale.

Trois questions, trois questions pour rendre aussi justice à cette pauvre petite victime.

Premièrement, monsieur le garde des sceaux, avez-vous l’intention de lancer un vaste plan de rattrapage pour notre justice pour la doter enfin des moyens dont elle a besoin, au-delà des ajustements budgétaires annuels ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

Deuxièmement, avez-vous l’intention de lancer enfin le chantier de réflexion sur le crime et la récidive, sur les récidives et sur les délinquances, puisque l’empilement des lois sécuritaires n’a servi à rien ?

Enfin, avez-vous l’intention, le pouvoir, la possibilité, d’éviter les débordements de M. le Président de la République sur ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR. – Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Monsieur le député, le gouvernement que dirige François Fillon est un gouvernement qui a agi pour la justice.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Non !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. De 2007 à 2011, 5 633 postes ont été créés au ministère de la justice, après les 988 postes de magistrats qui avaient été créés de 2002 à 2007.

M. Patrick Lemasle. Combien sont pourvus ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Cela montre la conscience d’un retard historique des moyens du ministère de la justice.

M. Patrick Lemasle. Ce n’est pas clair !

M. Michel Mercier, garde des sceaux. S’agissant du tribunal de Nantes dont vous nous avez parlé, il est doté de 48 postes. Tout au long des années 2009, 2010 et 2011, ce tribunal a eu, sauf aux mois d’août et de septembre 2009, 49 postes ou 50 postes, c’est-à-dire plus que sa dotation normale. S’il est vrai qu’il a manqué un poste de juge d’application des peines, le tribunal de Nantes a été correctement doté en postes de magistrats en 2009, en 2010 et en 2011.

Hier, M. le Premier ministre a dit très clairement qu’il demandait au ministre de l’intérieur et au ministre de la justice de lui faire rapidement des propositions pour combler les manques qui pouvaient apparaître en termes de fonctionnement et de postes. Il est évident que nous avons à faire des propositions qui porteront à la fois sur les greffiers, sur les agents de probation.

M. Patrick Lemasle. On patine…

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Les agents de probation ne sont pas assez nombreux, c’est vrai. Nous allons proposer de créer des postes dans les jours qui viennent, avec des mesures nouvelles que vous connaissez bien. Je veux dire que très naturellement…

M. le président. Merci, monsieur le garde des sceaux.

mardi 8 février 2011

« Le présumé coupable »

Moment très attendu, plus encore que d'habitude, la séance de questions au Gouvernement de ce mardi 08 Février 2011, toujours en cours à l'heure où ces lignes sont écrites a été marquée par une passe d'armes entre Jean-Marc Ayrault, président du groupe PS et François Fillon, Premier ministre.

Interrogeant le chef du gouvernement sur la multiplication des mouvements dans les branches régaliennes de la fonction publique d'État (armée, police, justice), Jean-Marc Ayrault a tenté de mettre le problème sur la table.

La réponse du berger...
Pour toute réponse, François Fillon n'a parlé que du « présumé coupable » et l'attitude des magistrats qui ne rend pas service aux français.

A François Fillon, j'aimerai dire ceci :
« Monsieur le Premier ministre,

Dans votre réponse à M. Jean-Marc Ayrault lors de la séance au gouvernement du mardi 08 Février 2011, vous avez, une nouvelle fois, parlé de « présumé coupable ». Aussi, je me permets de vous rappeler la formulation de l'article 9-1 du Code civil. Celui-ci dispose :

« Article 9-1 - Chacun a droit au respect de la présomption d'innocence.

Lorsqu'une personne est, avant toute condamnation, présentée publiquement comme étant coupable de faits faisant l'objet d'une enquête ou d'une instruction judiciaire, le juge peut, même en référé, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que l'insertion d'une rectification ou la diffusion d'un communiqué, aux fins de faire cesser l'atteinte à la présomption d'innocence, et ce aux frais de la personne, physique ou morale, responsable de cette atteinte.»

Cordialement.».

Rappelons que Brice Horterfeux a été dernièrement condamné pour... atteinte à la présomption d'innocence.


Un moment historique.
En ce sens, loin de remplir son rôle de garant des institutions, le président de la République remplit au contraire celui de fossoyeur. Réussir à presque mettre en grève les ordres judiciaires et administratifs dont la Cour de cassation, connaissant le conservatisme et la discrétion des magistrats, est un sacré tour de force. Comme le disait si justement le vice-président du TGI de Paris : « Nous sommes arrivés au point de rupture. ».

jeudi 3 février 2011

Toyota en France, les 10 ans.

10 ans, voilà 10 ans que l'usine Toyota d'Onnaing que la première Yaris est sorti des chaines de montage d'Onnaing dans le Valenciennois. Projet pharaonique, critiqué au départ par certains qui dénonçaient les profiteurs de subventions publiques et qui prédisaient un départ du constructeur japonais, une fois les aides publiques empochées.

Des aides mais un gros coup de pouce.
Et, en effet, le projet a bénéficié de nombreuses aides publiques pour son implantation. Mais, depuis, les collectivités et les pouvoirs publics en général se sont largement rattrapés. Depuis 10 ans, le constructeur japonais a versé plus de 130 millions € de prélèvement obligatoires mais a aussi investit 937 millions € dans son usine française pour la construire et la moderniser régulièrement. L'usine a aussi massivement recruté dans un bassin fortement touché par le chômage mais à l'envie de travailler et de réussir indéniables. Et cela, sans compter les sous-traitants qui ont accompagné l'implantation de l'usine Toyota.

L'implantation de cette usine n'est pas seulement pas une bouffée d'air frais mais un véritable renouveau puisque dans le même temps, les collectivités locales ont largement investi dans la qualité de vie et redessiné l'urbanisme local notamment avec l'implantation du tramway. De fait, ce n'est pas seulement sur le front de l'emploi que les choses se sont améliorés puisque c'est la région entière qui a bénéficié du renouveau valenciennois. A tel point, que les voisins belges soulignent la différence entre le cas de Valenciennes et de Charleroi. Les deux bassins de vie étaient largement touchés par le chômage mais là, où la France a mis les moyens sur la table pour relancer une zone sinistrée, les belges qu'ils soient flamands ou wallons n'ont pas pris la mesure de la tâche à accomplir. Les flamands notamment, refusaient et refusent toujours de payer pour ces profiteurs de wallons alors qu'il faudrait au contraire investir massivement pour faire cesser les transferts financiers entre les deux régions. Deux voisins si près mais pourtant si loin.


Tout n'est pas rose.
Mais au-delà de l'indéniable réussite économique locale, l'usine Toyota a aussi connu quelques soubresauts avec une grève en Avril 2009, la première depuis la création de l'usine. Les salariés manifestaient pour des revendications salariales ainsi que pour demander le maintien de la pérennité du site, des craintes se faisant jour au sujet de l'avenir de la production, aucun projet n'ayant, à ce moment, sur la future production de l'usine. Depuis, le constructeur a annoncé que l'usine d'Onnaing produirait la version hybride de la Yaris ainsi que l'annonce de divers autres modèles.

Du côté du Valenciennois, le chômage n'a lui pas non plus disparu et se maintient à un niveau élevé. Néanmoins, il convient de noter qu'il est bien inférieur à celui des voisins belges. Sur le front industriel, l'existence d'usines de constructions ferroviaires ayant une activité soutenue de même que d'autres activités montrent la vigueur du tissu économique local.


L'avenir ?
De l'anniversaire de l'usine Toyota, on peut retenir plusieurs choses : le succès de politique publique, l'engagement local mais aussi un peu de chance. Plus prosaïquement, on retiendra surtout que lorsque les pouvoirs publics se décident ensemble, collectivités et État, à se mobiliser pour un projet, celui-ci a de grandes chances de connaître le succès.

Récemment, Nicolas Sarkozy déclarait son intention de ne pas laisser mourir l'industrie française. Mais les faits sont là, depuis son arrivée au pouvoir, la part de l'industrie n'a cessé de décroitre. En refusant de prendre des décisions courages, en votant des textes sans consulter ou prendre en compte les avis des uns et des autres, Nicolas Sarkozy ne permet pas aux projets industriels de se développer en France.

Dernier exemple en date ? Les décisions désastreuses concernant le secteur des énergies renouvelables, dont l'avenir s'annonce particulièrement sombre. Dans le même temps, Barack Obama a annoncé que les États-Unis se fixaient pour objectif de produire 80 à 85% de leur électricité par des sources renouvelables d'ici 2035.

La différence entre les annonces et les actes.