Riposte graduée ? - La Quadrature du Net

mercredi 30 mars 2011

Trafalgar pour la droite.



Les élections cantonales terminées, tous les partis ayant pu jauger leur force, vient alors le temps des bilans pour les partis politiques. 1ière étape dans la revue des troupes.


L'extrême-droite plus en forme que jamais.
Pour beaucoup, l'acteur essentiel fut le Front national. Au cœur des débats, présent dans les urnes, le Front national ou plutôt ces électeurs ont répondu présents alors que la plupart des français ont boudés les urnes.

Si on regarde les résultats de plus près, on peut voir que c'est toute la moitié est de la France qui est touché parce que le FN appelle lui-même « une vague bleue Marine ». Les candidats présentés par le parti d'extrême-droite ne le renie d'ailleurs pas, leur seul et unique objectif était d'implanter Marine Le Pen dans l'objectif de l'élection présidentielle. Jeunes ou vieux, issus de tous les milieux, ils représentent ce que Marine Le Pen appelle la « vraie France des travailleurs ». Ignorants des compétences du département, ne connaissant même pas, la plupart du temps, leur suppléant, ces candidats ont pourtant réalisé des scores conséquents.

A titre d'exemple, dans le Nord, les candidats frontistes présents ont réalisé un score moyen de 35%, gagnant plus de 10 points par rapport au 1er tour.

Mais, le FN a-t-il réellement progressé ?
L'abstention, on l'a vu, a battu des records atteignant par exemple près de 65% dans le département du Nord contre 60% au niveau national. Ce phénomène aurait donc artificiellement pu faire monter le Front national. Mais est-ce juste une progression en pourcentages, ou au-delà, une progression en votes, ce qui serait bien plus inquiétant.

Pour vérifier cette situation, j'ai donc pris un bureau test et vérifié les scores du Front national en pourcentages et en votes. Le parti d'extrême-droite n'étant pas présent à chaque scrutin, on ne peut avoir un panorama complet. Aussi, pour rendre la situation plus compréhensible, je suis remonté jusqu'aux présidentielles de 2002 pour rendre la comparaison plus aisée.

Voici donc les résultats depuis 2002 :
- Présidentielles 2002 : 50 voix ; 16,78%.
70 voix ; 23,33%.

- Cantonales 2004 : 32 voix ; 12,08 %, candidat FN éliminé au 1er tour.
- Régionales 2004 : 40 voix ; 16,60%.
- Européennes 2004 : 24 voix ; 14,55%.

- Présidentielles 2007 : 57 voix ; 16,91%.
- Législatives 2007 : 15 voix ; 6,15%.

- Européennes 2009 : 25 voix (22+3) ; 12,63 % (11,11+1,52). Sur la région Nord-Pas-de-Calais, deux listes d'extrême-droite se présentaient : celle conduite par Marine Le Pen et une autre conduite par Carl Lang. Les deux étant sur le même ligne politique, j'ai artificiellement additionné les deux résultats.

- Régionales 2010 : 34 voix ; 16,19 % au 1er tour.
47 voix ; 20,61% au 2nd tour.

- Cantonales 2011 : 53 voix ; 24,77% au 1er tour.
63 voix ; 36,63% au 2nd tour.


Les leçons à retenir.
De ces résultats, on voit clairement que le Front national a réellement progressé. Or, présidentielles, avant 2007, il ne dépassait pas les 40 voix. En 2010, la désillusion vis-à-vis de la politique menée a eu un impact puisque le Front national a retrouvé ses niveaux traditionnels et s'approchait même de ces résultats en temps de présidentielles.

Avec les cantonales de 2011, on constate que le candidat frontiste engrange plus de voix dès le 1er tour qu'au 1er tour des présidentielles de 2002, moment historiquement favorable pour le FN. Au 2nd tour, en revanche, il ne parvient pas à égaler le score de Jean-Marie Le Pen en nombre de voix même s'il le dépasse largement en pourcentage (plus de 35% contre 23%). Le discours de Grenoble, les dérapages de Brice Hortefeux et la course à la sécurité et l'immigration lancée par le gouvernement ont donc eu pour principale conséquence de faire montre le FN tandis que la droite locale (dont je vous épargne les scores) s'effondrait.

Il y a donc un réel enracinement du vote d'extrême-droite et il est à craindre que si les choses continuent ainsi, et que le débat sur l'islam a lieu, que cela ne fasse que favoriser l'extrême-droite et ouvrir un boulevard à Marine Le Pen. Boulevard d'autant plus large que, contrairement à son père, celle-ci sait quand ne pas franchir la ligne jaune des petites phrases sur les thématiques liées à la 2nde Guerre mondiale.

Il faudra donc que les partis politiques présentent de réelles alternatives à ce qu'ils défendent traditionnellement comme programme afin de ramener les électeurs vers un vote républicain qu'il soit de gauche, de droite ou du centre.


La droite coule.
Littéralement submergée par les conséquences de sa politique de « droite décomplexée », l'UMP s'effondre ne parvenant pas dans nombre de cantons à se maintenir au 2nd tour. Le gouvernement avait voulu relevé le seuil requis pour se maintenir au 2nd tour à 12,5% des inscrits, la faiblesse de la participation combinée à une poussée de l'extrême-droite.

D'ici à 2012, on distingue un risque d'explosion de la droite. Au profit de qui ? A droite, la question reste posée. Jean-Louis Borloo semble résolu à faire quitter le Parti radical de l'UMP. Dominique de Villepin avec son mouvement République solidaire, a un positionnement à la fois dans l'UMP et en dehors, la question étant de savoir s'il va vraiment y aller au final. Alain Juppé, le « meilleur d'entre nous » disait de lui Jacques Chirac, ne semble pas tellement avoir envie de servir de kamikaze, pas plus que François Fillon.

De son côté, Jean-François Copé tente lui de tirer son épingle du jeu et mise sur l'échec de la droite en 2012 pour opérer le nettoyage dont il aura besoin pour se faire une place au soleil en 2017. Il a pour lui d'avoir conquis la direction de l'UMP, préalable indispensable à toute candidature présidentielle. En effet, sans parti, impossible de réussir à une élection présidentielle.

Ainsi, la droite est en passe d'être atomisée. Les multiples positionnements autour de l'attitude à adopter dans les duels face au FN en sont la parfaite illustration.

L'avenir de la droite française semble donc bien sombre. Divisée de toute part, soumise aux ambitions personnelles des uns et des autres, elle pourrait pour la première fois depuis la fin de la 2nde guerre mondiale, ne plus vraiment exister. Et cela, au plus grand bénéfice du Front national.

dimanche 27 mars 2011

Faire pencher la balance...

Aujourd'hui, dimanche 27 mars 2011, 2e tour des dernières élections cantonales. Un jour un peu particulier, puisque donc ce scrutin clôturera la période de l'élection des conseillers généraux et annonce la fin prochaine de l'échelon départemental qui sera fusionné avec l'échelon régional. Mais en ce jour, tel n'est pas l'intérêt de mon propos.

Aujourd'hui, lors de ce 2e tour, pour la première fois depuis un moment, l'abstention bat des records sur fond de montée du Front national. L'un comme l'autre montre un ras-le-bol certes, mais aussi une certaine désinvolture de la part des français.


L'abstention, fausse excuse mais vraie raison.
L'abstention donc bat des records ce qui est non seulement triste, mais déplorable car ceux qui n'iront pas voter seront les premiers touchés, quand bien même diraient-ils que cela ne changerait rien, qu'ils auraient tort. Ainsi, les rares électeurs des Hauts-de-Seine à s'être déplacé ont-ils l'occasion aujourd'hui de porter la voix de millions de français en infligeant la plus grande baffe depuis 1995 au président de la République. Chirac avait dissous et en avait pris 15 millions en 1995.

Le dimanche 27 mars 2011, les électeurs des Hauts-de-Seine ont de fortes chances d'en mettre une grosse, que dis-je une énorme baffe en votant pour les candidats opposés à ceux étiquettés UMP dans les 3 cantons de Puteaux, Levallois et Neuilly. Oh, l'élection de ces 3 conseillers généraux ne va pas fondamentalement changer la face des Hauts-de-Seine, tenu d'une ferme main par l'UMP, mais le vote en faveur de messieurs Grébert, Fromantin et Antoine de Courson aurait le mérite de déloger Vincent Franchi (dernier rejeton de la « dynastie »Ceccaldi-Reynaud), Marie-Cécile Ménard (fidèle d'entre les fidèles de la Sarkozye) et, last but not least Isabelle Balkany. Excusez du peu !

Et ainsi de faire comprendre au président de la République et à l'UMP que non, les français ne sont pas des veaux et qu'ils exigent une chose de leurs représentants politiques : de l'éthique !


« Pour votre santé, ...
...voter à chaque scrutin, vous empêchera d'être pris pour un imbécile ».
Pour beaucoup, le grand gagnant de ce scrutin est le Front national qui a réussi à s'imposer au cœur de la campagne des cantonales. Le président de la République et une bonne partie de l'UMP, à force de courir derrière l'extrême-droite, a fini par y convertir une part conséquente de son électorat. Le président de la République pensait écarter le Front national du 2nd tour et éviter les triangulaires en relevant le seuil pour participer au second tour de 10% à 12,5% des inscrits mais la principale victime fut l'UMP qui a été éjectée dans bien des cas.

Depuis les résultats du 1er tour, on nous bassine donc avec les concepts de « front républicain », de « vote utile » et des cacophonies au sein de la droite pour savoir quelle sera la consigne à donner aux électeurs. Ainsi, dans le département du Nord, un certain Hervé-Marie Morelle qui a eu l'honneur des lignes d'un de mes homologues blogueurs, a-t-il donné pour consigne de voter blanc. D'autres n'ont pas pris position, d'autres encore de former un « front républicain ». D'autres, la plupart d'ailleurs, auront le choix entre deux candidats « républicains » et s'éviteront ainsi un choix difficile.

Pour ma part, je préfère la position défendue par François Grosdidier, député en Moselle qui déclarait dès lundi matin sur les ondes de France Info qu'il défendait un « vote républicain » qui ne serait pas un « front républicain ». Selon lui, parler de « Front républicain » reviendrait à rentrer dans le concept frontiste « d'UMPS » et de préciser que dans un « vote républicain », on peut certes ne pas être d'accord avec le candidat opposé à celui du Front national mais il n'y a pas à hésiter car les deux ne défendent pas les mêmes valeurs.

Ainsi, confronté dans mon canton, à un duel PS-FN, je n'hésiterai pas une seconde à voter pour le candidat PS quand bien même je ne partage ni ses idées, ni sa passion pour le cumul des mandats. Le candidat frontiste n'a pas les mêmes valeurs ni la même conception respectueuse des autres. L'hésitation n'est donc pas possible quand bien même le candidat centriste pour lequel j'ai pu voté au 1er tour ne donnerait pas de consigne de vote.

lundi 14 mars 2011

Nucléaire, le nouveau boom.

Conséquente inattendue du séisme au Nord-Est du Japon, le relance du débat sur le pertinence du nucléaire en France et dans le monde.

Les faits.
En effet, suite au séisme et au tsunami généré par ce dernier, le bâtiment d'un premier réacteur (le n°1), puis celui d'un deuxième réacteur (le n°3) ont été pulvérisé. Point de nouveau Tchernobyl pour le moment puisque les bâtiments contenant les réacteurs, très légers, ne participent pas à la protection contre les risques nucléaires et que les cuves étanches le sont toujours. Néanmoins, des rejets radioactifs dans l'air ont eu lieu.

L'explosion ou plutôt les explosions sont la conséquence directe du séisme. En effet, suite à ce séisme, l'alimentation électrique des réacteurs et de leurs circuits de refroidissement ont lâché. Normalement, les systèmes de secours auraient dû marcher. Mais, ces systèmes de secours sont alimentés par des diesels qui ont été noyés par le tsunami. Il a donc fallu amener des groupes électrogènes de forte puissance et de l'eau borée permettant de stopper la réaction en chaîne pour refroidir les réacteurs. Mais suite au séisme, les axes de circulation étant complètement saturés, les opérations ont pris du retard. Les barres de combustible, qui doivent être immergées en permanence, ont réchauffés l'air et produit de l'hydrogène qui a causé l'explosion ou plutôt les explosions.

A l'heure actuelle, le réacteur n°2 menace lui aussi d'exploser et certaines informations à prendre avec une prudence renforcée parlent d'un fort risque de fusion du réacteur.
Sur les 6 réacteurs de la centrales de Fukushima, il y en donc 2 dont les bâtiments ont explosé, un 3e qui est sérieusement menacé, et 3 autres sous surveillance.

Ironie de l'histoire, le réacteur n°1 dont le bâtiment a explosé a été jugé suffisamment sûr pour voir son exploitation prolongé de 10 ans le mois dernier, en Février 2011 donc. A cela s'ajoute les risques dans d'autres centrales.


Le débat relancé.
C'est dans ce contexte que le débat sur le nucléaire est relancé. Le réseau « Sortir du nucléaire » et d'autres, mais aussi le cabinet Huglo-Lepage sont donc en première ligne sur ce point. Pour parler de ce dernier, c'est par l'intermédiaire de deux des associés que sont Corinne Lepage et Arnaud Gossement. Si ces derniers interviennent à titre personnel et non pour leur cabinet, on peut noter de leurs interventions de nombreux points intéressants.

Catastrophisme écologiste ?
Corinne Lepage d'abord semble avoir une vision un peu dramatique pointant notamment le silence et le secret sur le nucléaire. Ce dimanche, elle était invité d'un débat sur i>Télé avec Éric Besson, actuel ministre de l'énergie qui sans se démonter tient des propos excessivement rassurants. Un point de vue très tranché donc, mais qui n'est pas sans susciter des réactions contrastés. Ce lundi, la députée européenne avait l'occasion de répondre aux questions de Canal+ dans l'édition spéciale.

De l'autre, la position d'Arnaud Gossement plus mesurée semble plus refléter la réalité des choses. Invité d'Europe 1 lors du débat du journal du midi, Me Gossement rappelle que sortir du nucléaire à terme n'impose pas la fin du nucléaire en France mais la réduction de la place du nucléaire dans notre spectre énergétique. Position plus contrastée et qui a le mérite de moins offrir le flanc à la critique.

D'autres comme Daniel Cohn-Bendit ou Nicolas Hulot, respectivement invités d'Europe 1 et de France Inter ont de leur côté demandé l'organisation d'un débat sur le nucléaire.


Volte-face au gouvernement.
Du côté du gouvernement, après les premières réactions d'Éric Besson niant le fait que les évènements à Fukushima étaient très optimistes et se voulaient outrageusement rassurantes, comme en témoigne les attaques d'Éric Besson contre Corinne Lepage lors du débat organisé sur i>Télé dimanche.

Moins impérative, et plus rationnelle, Nathalie Kosiusko-Morizet, qui rappelons-le n'a plus l'énergie dans le périmètre de son ministère, a eu une position mesurée lors de son intervention au journal télévisée de 20h de France 2 rappelant que si le nucléaire n'est pas sans risques, la situation géographique et géologique française est moins problématique que la situation japonaise.

Invité d'une matinale radio ce lundi, NKM a reconnu que la situation de la centrale de Fukushima était une catastrophe nucléaire importante. Une nouvelle fois, NKM prouve sa compétence puisque sans nier les risques, elle a dénoncé les propos excessifs de certains écologistes.


Conclusion.
On le voit, les derniers évènements déchainent les passions. Si un débat sur la place de l'énergie nucléaire clair et transparent doit avoir lieu, il convient de ne pas s'égarer dans des positions extrêmes. Certes, la France pays le plus nucléarisé au monde doit revoir sa position sur cette énergie et l'adapter à la lumière des derniers évènements au Japon et des conséquences que l'on va en tirer. Néanmoins, il convient aussi de ne pas partir dans des envolés demandant la fin immédiate du nucléaire.

Car non, il ne sera pas possible de passer du jour au lendemain du nucléaire, pas plus que dans les 10 ans à venir. Néanmoins, en prenant la décision de réduire sa place dans notre mix énergétique, nous permettrons aux énergies renouvelables de devenir plus efficaces, plus performantes et de se tailler une vraie place dans notre pays. Cette décision permettrait aussi de donner enfin, le coup de fouet nécessaire au développement des différents secteurs liés aux économies d'énergies.

Non, il n'est pas impossible de sortir du nucléaire tout comme il n'est pas possible pour le moment de s'en passer. Comme le dit le proverbe : « Rome ne s'est pas faite en un jour ». La France de demain, ne se fera non plus si vite.