mardi 24 février 2009
Les Écureuils se rebiffent.
Le mariage entre les Banques Populaires et les Caisses d'Épargne était entrevue bien avant la crise avec la mise en commun des filiales de marché des 2 entités dans Natixis. La dégringolade des subprimes conjuguée à des investissements hasardeux et très risqué ont accéléré le processus. Les 2 banques mutualistes vont fusionner pour donner naissance à la 2e banque française et à la 3e banque européenne derrière HSBC et BNP-Paribas. L'État français qui a été l'un des moins interventionnistes auprès des banques a cette fois décidé de prendre des parts au capital de façon un peu spéciale.
Si j'approuve largement le principe que l'État entre au capital des banques en ces temps troublées, idée que j'ai largement défendue sur ce blog. Je désapprouve la méthode. Pourquoi ?
D'abord, parce que l'État ne sera pas vraiment un actionnaire plein et entier dans un 1er temps au moins. Nicolas Sarkozy a en effet décidé que l'État disposerait d'actions préférentielles convertibles en actions classiques au bout d'un certain temps en échange de la participation de l'État qui sera de 5 milliards d'euros en argent frais pour faire de la fusion entre l'Écureuil et les Banques populaires une réussite. Cette participation fera monter l'État à hauteur de 20% dans le capital de la banque nouvellement créée. J'estime cette participation insuffisante aux vues des nombreuses interventions de l'État dans le secteur bancaire. Le cas est aussi isolé puisque cette situation ne se retrouve pas pour les autres banques comme BNP-Paribas, la Société générale ou le Crédit agricole que l'État aurait dû nationaliser en partie pour réformer réellement le secteur. Cette voie n'a pas été choisie.
Mais plus grave, le président de la République a décidé que ce serait son conseiller économique M. Pérol qui dirigerait le nouvel ensemble. Ce qui est problématique, c'est que ce dernier, dont je ne remets pas en doute les compétences, a directement participé aux décisions concernant le sujet Banques populaires-Caisses d'Épargne. Si François Bayrou a dénoncé "l'illégalité" de la situation, une analyse plus fine montre que si le projet n'est pas illégal, il en est pas moins sur la ligne rouge. Les articles du code pénal sont à la fois clairs et flous. Clairs dans le sens où si l'on prend le texte dans le sens de la loi, la nomination de M. Pérol à la tête du nouvel ensemble est clairement "illégale" et contraire à l'esprit du texte. Flous car les dispositions si on les prend au pied de la lettre peuvent être contourné par le pouvoir en place et permettre la nomination de M. Pérol. Le président de la République, fidèlé à lui-même et à sa méthode qui ne marche pas et le rend chaque jour plus impopulaire, méthode qui consiste à faire du passage en force la règle pour gouverner, a donc décidé de passer outre l'opinion publique (ce qui est déjà dangereux), la loi et la constitution (ce qui l'est beaucoup plus). Provoquant ainsi le scandale parmi ses opposants mais aussi parmi ses partisans parmi lesquels Jean Arthuis président de la commission des finances au Sénat, mais aussi François Goulard (député UMP).
Toutes ces personnes dénonçent un conflit d'intérêts mais ne remettent pas en cause les qualités de M. Pérol, tandis que l'Élysée cherche à faire croire à tout le monde que les critiques portant +/- directement sur les qualifications de M. Pérol. Ce conflit d'intérêts est patant mais M. Sarkozy fait mine de l'ignorer et déclare ne voir aucun "problème" au fait que son conseiller dirige la future banque issu de la fusion des 2 mutualistes. J'en vois moi un énorme !
Pour y aller directement, un conflit d'intérêts tout simplement. Il est absoluement inadmissible qu'une personne ayant participé à prendre une décision sur des entreprises en tant que commis de l'État ait à diriger l'entreprise privé qui est sauvé par l'État. Cette décision va à l'encontre de l'esprit des textes et à l'encontre du mouvement de transparence du monde financier qui doit être exigé en ces temps de crise et que le président avait promis de faire son cheval de bataille durant la campagne électorale de 2007 et plus récemment au G20 de Washington.
Il a dû oublié cela à Gandranges avec un nombre incalculable de ses déclarations et autres promesses.
Mais surtout et là, c'est aussi scandaleux. Cette décision a été annoncée avant même que la fusion entre les 2 banques aient lieu et alors que l'État ne possèdera à terme une participation équivalente à 20% du capital. Les Caisses régionales de l'Écureuil qui avaient acheté leur indépendance à la Caisse des dépôts et consignations près de 7 milliards € n'acceptent pas qu'on leur impose un parachuté qui vient pantoufler alors même que ces caisses régionales sont plus que majoritaires dans le capital. Certains directeurs régionaux ayant même menacé de voter contre la fusion et de fait, de retarder la fusion si on ne nommait pas quelqu'un d'autre en leur demandant leur avis. M. Sarkozy qui s'est battu afin que les actionnaires puissent protéger leurs droits fait exactement le contraire de ce qu'il faudrait faire (mais on commence à en avoir l'habitude ce qui est un signe grave). Les caisses régionales respectives de chaque banque n'ayant même pas été consultées sur cette nomination ce qui pose un sérieux problème vu qu'elles représentent la grosse majorité des actionnaires de chaque banque.
La nomination de M. Pérol n'est donc pas seulement un problème de déontologie et de légalité, c'est une violation de l'égalité entre actionnaires. Les caisses régionales menaçant de s'opposer à la fusion, la présidence de la République fait savoir que la nomination de M. Pérol n'était pas encore actée (tu parles !) et que d'autres personnes seraient sur les rangs (on verra). Voilà donc encore un projet qui semble bon sur le papier qui s'effondre un château de cartes comme la plupart des sujets de "réforme" du président.
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Affaire Pérol
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