Riposte graduée ? - La Quadrature du Net

mardi 19 janvier 2010

Bisbilles dans le nucléaire.

Le moins que l'on puisse dire en ce moment, c'est que la situation est explosive au sein de la filière nucléaire, secteur présenté comme un des fleurons de notre industrie nationale. EDF et Areva, les deux grandes entreprises françaises se chamaillent à propos de la question du retraitement des déchets nucléaires. Mais pourquoi donc ces deux grandes entreprises, chacune leader dans leur domaine au niveau mondial, ayant le même actionnaire majoritaire : l'État, se chamaillent-elles ?


Abu Dhabi, le détonateur.
Peu après la visite de Nicolas Sarkozy aux Émirats, le camp nucléaire français croyaient avoir gagné la partie mais les émiratis ont un sens de l'honneur qui semble échapper à nos éminents chefs d'entreprise et sont très respectueux des procédures. Conséquence, la fanfaronnade française (une mauvaise habitude nationale) est tombé à l'eau. Ainsi que l'a écrit un certain Jean de la Fontaine : « Il ne faut jamais vendre la peau de l'Ours qu'on ne l'ait mis par terre » (L'Ours et les deux compagnons).

Les émiratis dans le cadre de leur marché recherchait aussi un partenaire fiable sur lequel ils pourront se reposer ne maitrisant pas eux-mêmes la technologie nucléaire. Aussi, les déclarations du tout nouveau président d'EDF Henri Proglio sur la nécessité de réorganiser le secteur nucléaire français ont pu être considéré comme un aveu de faiblesse. Pourquoi confier un contrat de grande ampleur à un consortium dont les acteurs avouent d'eux-mêmes qu'ils sont désorganisés ?

M. Proglio payé une fortune devrait relire le protégé de Fouquet qui écrivait ceci dans une autre de ses fables : « Toute puissance est faible à moins que d'être unie » (Le vieillard et ses enfants).

Pour les émiratis, ce contrat n'en est qu'un parmi d'autres et ceux-ci comptent sur de nombreux autres contrats mirobolants pour garder de bonnes relations avec la France. Reste maintenant à exploiter la situation et à cultiver nos relations avec nos nouveaux amis arabes. En effet, s'il y a bien quelque chose à cultiver, ce sont les relations d'amitié et de confiance très importante pour les arabes.

Mais, depuis cet échec, le conflit couve entre les anciens partenaires du consortium en compétition. Le dernier épisode est tout récent.


EDF/Areva. Et l'orage éclata...
Récemment, on a pu apprendre que les hostilités étaient officiellement ouvertes. Areva ayant annoncé qu'elle ne ramasserait plus les déchets nucléaires d'EDF pour les retraiter à la Hague tant qu'un nouveau contrat concernant ce point, ne serait pas signé. Et l'entreprise de préciser que pour autant, cela ne remettait pas en cause le fonctionnement des centrales nucléaires françaises, EDF ayant une capacité de stockage de 6 mois.

Le hic c'est que les "incidents" se multiplient dans les centrales nucléaires nationales au point qu'EDF ait à importer d'importantes quantités d'électricité pour couvrir les besoins français cet hiver. D'où de légères tensions sur le sujet. Du côté d'EDF, pas un mot, le sujet est tout aussi sensible.

En fait, le problème se situe au niveau du prix exigé par Areva pour le retraitement. Chez EDF, on estime qu'Areva profite de sa situation de monopole pour pratiquer des prix trop élevés. Du côté d'Areva, on estime que le prix est justifié et que les demandes d'EDF sont injustifiées.
Le problème est que l'un ne peut faire sans l'autre et l'autre sans l'un puisque qu'Areva n'a en France qu'un seul client : EDF et qu'EDF n'a qu'un seul fournisseur Areva. Ajoutons à cela que les deux entreprises sont très massivement détenues par l'État français qui fait preuve dans ce dossier d'un manque de réactivité patent.


Conclusion.
Deux entreprises condamnées à s'entendre, un même actionnaire et un impératif de service public, les protagonistes n'ont d'autre choix que d'accorder leur violon. Reste à savoir si les conflits de personne vont empoisonner pendant encore longtemps le secteur nucléaire français au point de risquer de le mener à sa perte. Reste aussi à savoir ce que compte faire l'État dans une situation dont on attend avec impatience qu'elle soit réglé par lui. Décidément, le nucléaire est un sujet explosif.

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