Riposte graduée ? - La Quadrature du Net

jeudi 21 janvier 2010

François Bayrou. L’homme au centre du vide ?

François Bayrou est un homme politique du centre, cela on le sait depuis quelques temps. Mais avec la multiplication des désertions, débauchages et autres ralliements à l’approche des élections régionales, on peut se demander quel est le projet politique qui est le sien, en quoi il se différencie des grands partis traditionnels, en quoi celui qu’il propose est centriste. En résumé, François Bayrou est-il encore au centre du jeu ? François Bayrou est-il réellement un homme au centre ? Et si oui, au centre de quoi ?

Pour la rédaction des
Guignols de l’Info, la réponse est claire et limpide : François Bayrou est au centre du vide. L’émission satirique phare de Canal + n’a jamais épargné qui que ce soit mais il se pourrait cependant que la réalité soit un peu plus complexe.


Guignols de l’Info, l'effet jokari.
Lors de la campagne présidentielle de 2007, François Bayrou avait avoué avoir été très affecté par l’image que donnait de lui l’émission « Les Guignols de l’info » sur Canal+, au point d’avoir songé à arrêter la politique. Si depuis, l’homme s’est ressaisi et est reparti au combat, il a tiré de cela quelques enseignements et adopte une certaine distance, pour ne pas dire prudence vis-à-vis de ce programme. Bien lui en a pris puisque depuis quelques temps, il est moqué pour son isolement politique. Voici donc les Guignols de l’info le caricature en allumé du réseau social Facebook perdant ses « amis ». Image peu glorieuse qui caricature les risques pris par François Bayrou lors de la fondation du Mouvement démocrate. Pas vraiment de raisons de se réjouir donc.

Tel semble ne pas être le cas de quelques-uns pour intégrer l’émission de Canal+ est en quelque sorte une consécration. Aussi lorsque la marionnette d’Alain Dolium fit son apparition aux Guignols, certains n’hésitant pas (comme le reporte
le site du quotidien gratuit 20minutes) à en faire un argument pour les régionales. Sauf que, l’argument est revenu par un considérable effet boomerang dans la figure de ces personnes.

Ainsi pas plus tard que lundi dernier (le 18 Janvier 2010), les Guignols de l’info ont complètement ridiculisé François Bayrou soulignant qu’encore une fois des « cadres » du Mouvement démocrate avait accepté la proposition de Ségolène Royal de rejoindre les listes socialistes dès le 1er tour des régionales. Par une manœuvre dont l’objet était évident, le président du MoDem de Charente-Maritime a en apparence rallié son mouvement départemental à Ségolène Royal. Or, les choses ne sont pas vraiment celles-là et si le MoDem de Charente-Maritime a bien perdu son président, il n’en reste pas moins attaché à l’autonomie aux régionales.




L’épisode serait relativement anecdotique normalement. En effet, depuis que la politique existe, il y a toujours eu des débauchages et des ralliements afin d'obtenir des places d’élus. Cette mauvaise habitude fut « institutionnalisée » en 2007 avec Nicolas Sarkozy et ainsi, chaque partie y va de son « ouverture ». Conséquence de ces ralliements, des personnes quittent un parti pour en rejoindre un autre. A ce petit jeu, le Mouvement démocrate est assez tentant. Jeune formation politique, plusieurs échecs électoraux depuis sa création, voici des raisons suffisantes pour en faire la cible privilégié pour ce procédé. D’où la question suivante : François Bayrou est-il seul au point de ne plus avoir d’amis et de n’être qu’au centre du vide ?
François Bayrou a-t-il encore des amis ?

Lors de sa création en 2007, il était clair que l’après élection présidentielle risquait fort avec la création du « Nouveau Centre » de se transformer de s’accompagner d’une nouvelle traversée du désert jusqu’en 2012 ; celui était accompagné d’une troupe nombreuse de bédouins ayant rejoint de manière spontanée le nouveau parti qu’il créait alors : le MoDem.

Depuis ce temps, de l’eau a coulé sous les ponts et le parti centriste a été marqué par une véritable hémorragie militante. S’il est de tradition que les mouvements politiques perdent des adhérents en nombre en dehors des échéances électorales présidentielles, le MoDem fut particulièrement touché.


Mais enterrer François Bayrou si rapidement semble quelque peu précipité. Bien que son échange animé avec Daniel Cohn-Bendit lui ait momentanément faire perdre une partie de sa popularité, il bénéficie encore d’une bonne côte d’amour auprès des français qui apprécie ses sorties dans le domaine des valeurs morales, du respect de la justice ou de l’éducation.

Si le Congrès d’Arras n’a pas réuni autant de monde que celui de Villepinte (Congrès fondateur, ndlr), un grand nombre de militants s’y sont déplacés pour réformer le projet démocrate. Ce qui fait dans une ambiance bon enfant. François Bayrou a donc encore des amis.



Et les régionales dans tout ça ?
Dans le cadre du scrutin de mars prochain, le président du MoDem a réussi à faire accepter par le Conseil national du Mouvement démocrate, le principe de listes autonomes au 1er tour. Sauf drame de dernière minute, le MoDem présentera donc bien des listes dans toutes les régions de France au 1er tour. A charge ensuite pour le parti d’approuver ou non le principe d’alliances pour le second tour s’il s’avère que les choses se passent bien.

Pour le moment, et à la veille du lancement de la campagne des régionales, les unions locales finissent l’élaboration de leur programme (Ile de France) ou l’ont déjà fini (Nord-Pas-de-Calais). Reste à régler le détail de la composition complète et détaillée des listes qui se présenteront au suffrage des français et c’est là que cela grince des dents. En reconduisant le même mode de désignation choisi pour désigner les candidats aux élections européennes, les mêmes critiques et problèmes émergent ? Ainsi en est-il des tentatives de débauchages et de ralliements.

Bien que le MoDem ne soit pas au mieux de sa forme dans les sondages, son potentiel électoral est convoité, aussi bien à gauche qu’à droite de l’échiquier politique. Preuve s’il en est que son positionnement politique intéresse, pour diverses raisons d’ailleurs. Suivant les régions, le MoDem apparaît comme un parti à éviter. Dans d’autres, c’est au contraire un partenaire incontournable ou dont pour l’intérêt est important. Ainsi, loin d’être fini, le Mouvement démocrate semble au contraire intéresser bien du monde.

Et il se pourrait bien que la bataille pour le leadership de la gauche se solde par un certain succès du MoDem. Pas dans toutes les régions bien sur, mais dans quelques-unes comme l’Alsace, la Lorraine, l’Aquitaine, le Nord-Pas-de-Calais. Avec son réalisme, et des idées originales, le Mouvement démocrate sera un acteur sur lequel il faudra compter.

François Bayrou est donc loin d’être seul même s’il a décidé de prendre le risque de l’être pour garder ses idées.


Note.
Dans son agenda, François Bayrou viendra, ce jeudi 21 Janvier 2010, rendre une petite visite aux démocrates nordistes après un débat à l’IEP de Lille sur le thème « Une autre politique est-elle possible ? ». J’y serai avec quelques centaines d’autres…

6 commentaires:

Nicolas Mauduit a dit…

La Lettre Démocrate enjoint les adhérents chaque semaine depuis son numéro 14 à "retrouver" François Bayrou sur facebook (ainsi que d'autres personnalités du Mouvement Démocrate depuis le N° 16) : faut-il chercher ailleurs la source des derniers sketchs de canal+ le concernant?

J'y ai trouvé assez futile la mention explicite du nombre de fans/soutiens, comme si c'était une mesure objective de quoi que ce soit, et je ne suis pas certain que cet usage d'un réseau social (compter plutot qu'échanger) soit le plus pertinent, ni le plus efficace à exploiter d'un point de vue communication politique.

Sur cet aspect numérique, le nombre de fans de Sarkozy me parait d'ailleurs un peu curieux, sentiment conforté quand on parcours sa page...

Orange pressé a dit…

@Nicolas Mauduit : Cette posture des Guignols date d'avant la mise en place d'un "plan" pour être présent sur les réseaux sociaux. La pénétration de ce réseau dans la société et l'idée associé que l'on y échange avec ses "amis" joue à fond avec le côté solitaire de notre béarnais de président.

Sur les différents nombres, ce n'est pas ce qui compte mais le décalage créé entre la réalité et l'image donnée, ce que donne son intérêt à la satire.

JF le démocrate a dit…

Les Guignols de l'Info ont toujours été un problème pour FB: il a toujours été caricaturé en "neuneu". Alors que d'autres personnalités sont quand même bien plus positivement représentées: Sarkozy, Chirac, Ben laden...

Cette émission me fait bien rire, mais je crois qu'il est temps qu'elle s'arrête.

Orange pressé a dit…

@JF le démocrate : Les Guignols sont en quelque sorte un indicateur de la perception que nous générons. A nous d'en tenir compte et de nous adapter.

FrédéricLN a dit…

S'agissant des Guignols : "Lors de la campagne présidentielle de 2007, François Bayrou avait avoué avoir été très affecté par l’image que donnait de lui l’émission « Les Guignols de l’info » sur Canal+, au point d’avoir songé à arrêter la politique."

Il s'agit de 2002 et non de 2007, et effectivement le visionnage d'un montage de tous les sketches des Guignols le concernant avait donné à François Bayrou l'impression qu'aucun de ses messages de campagne ne passait... jusqu'à se demander si elle servait à quelque chose. Il l'a néanmoins poursuivie ;-)

Orange pressé a dit…

@Frédéric LN : L'année n'est pas précisée mais oui il s'agit bien de 2002.