Une fréquentation toujours aussi forte.
Transportant plus de 3,9 millions de voyageurs par jour, soit un total d'1,409 milliard par an, le métro est donc un succès. Avec une évolution profonde et continue, il constitue un élément indissociable du paysage parisien, à tel point qu'il sert régulièrement de décors aux diverses productions cinématographiques, qu'elles soient françaises ou étrangères.
Victime de son succès, le métro est très emprunté, tellement emprunté qu'apparaissent depuis une vingtaine d'années, un certain nombre de problèmes dû à sa surfréquentation. Ainsi, les usagers subissent un certain nombre de désagréments comme l'aération insuffisante, la température excessive ainsi que la dégradation du matériel. Dernièrement, l'irruption du web 2.0 sur les téléphones mobiles et de ses réseaux sociaux a donné naissance à plusieurs flux dont le très connu : @ratp_users qui recense en temps réel les différents désagréments et les problèmes que peuvent rencontrer les usagers des transports en commun franciliens.
Pas de réel effort depuis 1935 !
Aussi surprenant que cela puisse paraître, il n'y a pas eu d'efforts considérables depuis 1935 pour développer massivement le métro en 75 ans excepté la création de la ligne 14 en 1998. Certes, les différentes lignes ont, pour la plupart d'entre elles, été prolongées mais aucun effort de grande ampleur n'a vraiment été lancé. Ainsi, les lignes connaissent toutes de fortes fréquentations à plus de 95% pour les moins fréquentés à plus de 130% pour la ligne 13, la pire du réseau parisien.
Tout cela pouvait être compris lorsque l'on pouvait encore compter sur la voiture individuelle. Mais depuis une dizaine d'années, comme toutes les grandes villes de France et du monde, la ville de Paris et plus généralement toute l'agglomération parisienne, s'est lancée dans une grande opération de requalification urbaine privilégiant les voies piétonnes, les transports dit doux comme le bus ou le tramway ainsi que la marche à pied et le vélo via les installations en libre-service du type Vélib' ou Vélov'. Le problème, pendant que l'on réduit la place de la voiture dans le cadre de ces opérations de transport, est que le nombre d'usagers augmente non seulement par effet de transfert mais aussi du fait d'une vision déséquilibrée de l'urbanisme.
Ainsi, la multiplication des tours de la Défense accroit un peu plus la saturation des infrastructures de transport en commun qui desserve le quartier que ce soit le métro, le RER A, les lignes de bus ou le tramway T2.
Conséquence de l'accumulation de ces différents facteurs, la situation devient explosive dans les transports et pour les personnels avec la multiplication des agressions envers ces derniers. La nouvelle méthode de gestion du matériel par le RATP et la SNCF donc le STIF qui a remplacé une approche préventive par une approche curative (avant on remplaçait avant que le matériel tombe en panne tandis que maintenant on attend que le matériel tombe en panne pour réparer) n'arrange rien.
Tous ces facteurs contribuent donc à la saturation des transports en commun de l'agglomération parisienne.
Que faire ?
Face à une telle situation, il convient de prendre des mesures fortes. La schéma directeur régional d'Ile de France ou SDRIF approuvé en septembre 2008 par la Région mais bloqué jusque récemment par le Premier ministre (le document nécessitant pour entrer en vigueur un décret en Conseil d'État) qui l'a transmis au Conseil d'État le 10 juin 2010. Résultat, 1 an et demi de perdu pour un document qui relançait timidement l'investissement dans un secteur longtemps délaissé.
Ce schéma donne quelques signes positifs notamment avec l'inscription du projet Arc express (une RER faisant le tour de la capitale en moyenne banlieue) qui illustre l'importance de passer d'une logique d'organisation des transports en étoile à un logique d'organisation en toile d'araignées. Néanmoins, de nombreux points noirs ne sont toujours pas réglés.
Que faire face à la surcharge déjà patente du métro ? Quelle organisation urbanistique pour concilier le développement de l'agglomération parisienne avec les contraintes actuelles que ce soit en matière de bruit ou de respect de l'environnement ?
L'indispensable plan Marshall.
Dans un contexte difficile où les pouvoirs publics, collectivités comme État, sont tous endettés, il convient non seulement d'apurer les comptes publics mais aussi de préparer les conditions pour permettre la croissance de demain. Si l'agglomération parisienne a pu se développer, c'est bien grâce aux efforts en matière de transports collectifs notamment sur les liaisons entre le centre et sa banlieue. L'histoire est un éternel recommencement. Nos décideurs feraient donc bien de se rappeler qu'un certain baron Haussmann par les grands travaux qu'il avait dirigé avait non seulement endetté la ville de Paris pour 50 ans mais en avait aussi fait une ville moderne dotée de larges avenues, de grandes gares permettant de circuler aisément en son sein.
Aujourd'hui, si l'insalubrité n'est pas celle du XIXe siècle, la saturation est telle que l'asphyxie et la paralysie guette la ville Lumière. Pour résoudre le problème, il n'y a donc qu'une solution : investir, et massivement. Investir en développant le métrophérique pour doubler le périphérique, en triplant au moins la capacité du métro avec des lignes automatisées à très grande capacité ; en remplaçant les lignes de bus les plus saturées par des tramways ; en construisant en sus d'Arc Express, un ligne de RER rapide en très grande banlieue, qui ne soit pas forcément à grande vitesse mais simplement adaptée pour la circulation de trains classiques rapides (240 km/h), en développer plusieurs autres traversant Paris, d'autres encore dédiées au transports entre banlieue ; tripler la capacité de la gare Saint-Lazare ; construire 1 ou 2 nouvelles gares pour face aux besoins.
Alors oui, tout cela nécessite de l'argent, beaucoup d'argent, trop diront certains mais cela n'est que la conséquence d'un sous-investissement chronique qui n'a que trop duré. Dans la plus optimiste des versions, il y en a pour 50 à 60 milliards €, plus sûrement le double soit 100 à 120 milliards € avec très certainement des dépassements. Comment financer tout cela quand l'État est sans le sou et que les moyens des collectivités sont réduits du fait de « l'enveloppe normée », de la refonte de la taxe professionnelle et de la réforme des collectivités locales. Là encore, une solution : augmenter la fiscalité.
Mais augmenter les prélèvements existants ne suffira pas, il va falloir en créer de nouveaux en taxant les automobilistes, les voitures polluantes, la plus-value immobilière tirée de la proximité de nouveaux transports collectifs, etc. Il faudra aussi en passer par la dette car il est normal qu'un investissement destiner à durer longtemps soit payé par les différentes générations qui en bénéficieront. Durée annoncée de la dette, au minimum 25 ans, plus surement 30. Et tant qu'à penser une opération d'ampleur, autant en profiter pour repenser l'urbanisme en développement un modèle multipolaire soucieux de préserver les surfaces urbaines et s'intégrant dans une démarche respectueuse des critères environnementaux les plus stricts. Un sacré travail en perspective !
Conclusion.
L'anniversaire du métro, la crise montrent combien nos sociétés doivent repenser leur façon de construire la ville, d'habiter la ville, de l'organiser. Les transports en commun ne sont, certes, au final qu'un des aspects de cet ensemble mais il s'agit de celui dont les habitants sont le plus proche au quotidien.
Le problème n'est d'ailleurs pas spécifique à Paris mais à toutes les grandes métropoles. Ironie du sort, la stratégie de développement de la RATP en constitue un parfait exemple. Via sa filiale RATP Dev, la régie parisienne a décroché la gestion du métro d'Alger ou du tramway de Florence où sont vantés, le savoir-faire de la régie et l'intégration des transports dans la ville et la modernité des solutions mises en œuvres.
En Chine, les pouvoirs publics qui font face à une urbanisation galopante multiplient la construction de transports en commun dit lourds, c'est-à-dire à très forte capacité et sollicitent largement le savoir-faire français.
Face à ces défis majeurs, la France n'est pas le pays le moins armé, bien au contraire. Leader dans le domaine des transports en commun, notre pays dispose d'un réel savoir-faire qui s'exporte déjà. La relance de notre économie nationale passe aussi par le développement d'infrastructures de qualité. Ce critère est d'ailleurs un des atouts de notre pays pour séduire les investissements directs internationaux. Ainsi, la France se place 3e au plan mondial et 1ière au niveau européen juste derrière les États-Unis et la Chine.
Notre développement futur, son ampleur dépendent aussi; surtout devrait-on dire des investissements réalisés en période creuse. Et cela, seuls les pouvoirs publics peuvent l'impulser. Ce sera ensuite au secteur privé de prendre le relais et de profiter de ces investissements pour lui même se lancer dans des projets et ainsi qu'à l'export.
Mais pour que tout cela soit possible, encore faut-il une volonté de fer des décisionnaires tant publics que privés. Et actuellement, on en est loin...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire