Riposte graduée ? - La Quadrature du Net

samedi 22 août 2009

"Couvrez cette réalité que ne je saurais voir."

La fin Août approche et avec elle s’annonce la rentrée et les diverses universités d’été, de rentrée et autre réunion de réflexion. Bref, la saison redémarre que ce soit en football ou en politique. Alors que les Verts terminent la leur cette semaine, où l’on peut voir que la question d’une possible alliance avec le MoDem soulève les passions, les jeunes populaires préparent eux leur campus.
Fil directeur cette année, « Changer le monde ». Rien que ça !

Si on se laissait aller à un élan d’optimiste démesuré, on pourrait croire que ça y est, l’UMP a compris que sa politique ne marchait pas et menait la France dans le mur. Toutefois, le lecteur de ce billet a bien compris que ce n’est pas vraiment ce qui se passe. La chose la plus parlante reste la lettre d’information que les jeunes bleus ont diffusée hier. A côté des conseils éclairés conseillant aux jeunes populaires d’utiliser la fonction partager de Facebook pour porter la bonne parole UMP, de la traditionnelle consultation sur les grandes orientations qui seront prises par les jeunes populaires , ce qui soit dit en passant est totalement inutile puisque les grandes orientations des jeunes populaires sont préparées dans un hôtel particulier en face de la place Beauvau, ou encore d’un sondage pour trouver le nouveau nom du PS comparable à un exercice de lancer de tomates pourries, on peut trouver quelques pépites.

Ces pépites, ce sont un article expliquant aux jeunes militants UMP que les Ardennes ce n’est pas seulement un massif montagneux recouvert de forêts mais aussi un département et une revue de presse. Revue de presse passablement orientée, qui montre toute l’étendue de la compétence de l’UMP en matière de désinformation et d’occultation de la réalité et montrer que la politique menée par notre président est formidable.

Problème dans le même temps, le quotidien économique La Tribune publiait un article de fond sur la loi TEPA, plus couramment appelée « Boulet fiscal » étant donné son coût très important pour des retombées plus que limitées. Mais revenons-en à nos moutons et attardons-nous un peu sur cette fameuse revue de presse.


« Ah ! Vous êtes dévot, et vous vous emportez ! »
Plusieurs choses dans cette lettre d’informations, quelques propos sorties de leur contexte et sans réelles explications, des comparaisons entre choses incomparables ou encore les statistiques de l’INSEE qui suscitent une joie immodérée. Attention, les propos qui suivent sont conseillés à tout public, et particulièrement aux personnes qui souhaitent qu’on arrête de se moquer d’eux.


Première étape : La radicalisation des bases syndicales.
Les jeunes UMP mentionnant les désaccords internes à la CGT se frottent les mains en citant les propos du délégué CGT de l’usine Continental de Clairoix à l’encontre du secrétaire général de la CGT. L’occasion de faire passer Nicolas Sarkozy pour une personne ouverte et à l’écoute de la parole syndicale.

Il est intéressant de voir que le contexte social a été complètement oublié.
Le groupe Continental qui s’est récemment fait racheter par une entreprise familiale, la société Schaeffler qui s’était endettée de 12 milliards d’euros pour mettre la main sur l’entreprise de pneumatiques. Manque de bol, la crise financière est arrivée peu après et la petite société familiale a été confrontée à renchérissement considérable de sa dette. Pour rembourser, il faut que Continental dégage un maximum de liquidités à court terme. Conséquence, les usines les moins rentables même bénéficiaires sont fermées et délocalisées dans des pays à bas coût de main d’œuvre. La fermeture de l’usine de Clairoix va complètement sinistré un bassin d’emplois et la politique gouvernementale n’arrange pas les choses. Confrontés à l’absence d’interlocuteurs, les ouvriers de Clairoix se sont radicalisés. Dans le même temps, le gouvernement fait semblant d’écouter les syndicats et de se ranger derrière les négociations collectives avant de changer son fusil d’épaule et d’imposer sa volonté en dépit des compromis négociés. Ceci contribue à la dévalorisation du rôle des syndicats déjà peu puissants en France. Il convient donc de rappeler les conséquences de leurs décisions aux chefs de la majorité et au gouvernement.


2e étape : Internet comme argument pour justifier le travail dominical.
Comment n’y avait-on pas pensé avant ? Reprenant des propos de David Barroux, journaliste des Échos qui écrit, je cite : « Au nom de quelle philosophie anticonsumériste peut-on contraindre les boutiques à rester fermées quand via internet chacun peut (…) acheter 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 ? Devrait-on interdire la vente sur internet du samedi soir au lundi matin ? » et les jeunes UMP de préciser « Voilà qui est à apporter au débat » et de poursuivre : « A entendre certains, repos dominical oblige, c’est limite si tout ne devrait pas stopper. Aller, soyons fous : demain, suivant cette logique, on pourrait, au nom de la morale, fermer les hôpitaux, la SNCF, les marchands de journaux, les boulangeries… Certains diront que c’est une mauvaise carricature, mais au nom de quoi certains travailleraient le dimanche, et d’autres pas ? Et celui qui achète son journal le lundi matin à 9 h, pense-t-il qu’il a été écrit et imprimé de 6 à 8 h ? ».

Vous noterez non seulement les fautes d’orthographe, mais le concours de mauvaise foi pratiqué chez les jeunes populaires. Selon eux, Internet étant ouvert 24h/24, il serait anormal d’interdire aux grandes enseignes commerciales d’ouvrir le dimanche. Mieux, la loi sur le travail dominical répare une injustice et serait bonne pour l’économie et d’appuyer leurs propos sur le fait que certains services ou commerces ouvrent le dimanche et donc que les opposants sont opposés à leur ouverture.

Précisons plusieurs choses. Les boutiques sur Internet sont soumises à un régime juridique différent, celui de la vente à distance ou VAD, régime très différent de celui des boutiques en dur.

Autre détail qui n’échappe pas l’œil de toute personne lucide, les e-boutiques sont basées sur des serveurs qui sont des machines tournant en permanence mais les commandes sont traités comme dans toute entreprise normale de vente à distance. Soit du lundi au vendredi voir samedi, les salariés ne travaillent en aucun cas le dimanche ou les nuits pour expédier les commandes aux clients. Les entreprises de VAD sont tout autant soumises au Code du travail que les autres entreprises.

Enfin, il a échappé aux jeunes UMP que les services publics par leur nature même sont soumis au principe de continuité et disponibilité. Ces obligations rentrent dans un régime juridique particulier et expliquent ce que l’on appelle plus communément les contraintes de service public et s’accompagnent de prérogatives spéciales pour l’administration ou les prestataires. Quand à la situation des kiosquiers ou des boulangers, ils sont soumis à des obligations légales et doivent fermer pour compenser l’ouverture dominicale. Précisons aussi que tout petit commerçant peut librement ouvrir mais ne peut faire travailler ses employés, il a juste le droit de travailler lui-même. La nouvelle loi sur le travail dominical ne fait donc que favoriser les grandes surfaces autres qu’alimentaires comme l’a précisé Michel-Édouard Leclerc, président du groupe d’indépendants du même nom. Cela se confirme par le nom du député de la loi, M. Maillé (UMP) qui a sur sa circonscription électorale, la zone commerciale de Plan de campagne, connue pour ses régulières entorses au Code du travail.


3e étape : La relance gouvernementale nous a remis sur le chemin de la croissance.
Christine Lagarde, Eric Woerth et Christian Estrosi se sont fait tancés par le président de la République pour ne pas s’être félicité assez rapidement du retour de la croissance affiché par la France au 2e trimestre selon l’INSEE.

Problème, l’INSEE est régulièrement épinglé par l’Union Européenne pour ses prévisions beaucoup trop optimistes. L’institut Eurostat a d’ailleurs mis en doute la statistique française qui avait affirmé que la France avait été en croissance de +0,13% ou +0,14% durant un semestre. Après correction et prise en compte de la marge d’erreur statistique, il s’est avéré que la France était bel et bien et récession. C’est à peu près la même chose pour ce trimestre, où la croissance serait nulle ou négative. Et à penser qu’elle soit tout de même positive, elle serait anémique. Les critiques de jeunes populaires contre l’appel de Michel Sapin au pragmatisme et à la prudence paraissent donc malvenues.

Surtout que pour les jeunes populaires, les appels à la prudence de Michel Sapin (PS) ne sont pas justifiés. Pour les jeunes UMP, le PS n’est pas crédible puisqu’il a signé le Manifesto en mai dernier à Madrid et que l’Espagne affiche une récession de -1% pour le 2e trimestre 2009.
A titre personnel, je ne vois pas le rapport entre les appels à la prudence plus que lucides du PS, la signature du Manisfesto par le PS et le fait que l’Espagne soit en récession au 2e trimestre 2009. Il m’expliquer le lien car vraiment je ne vois pas. Nos amis ibériques sont en récession suite à la crise économique qui est la conséquence d’une bulle immobilière locale et de la crise de financement mondialisée. Prétexte d’ailleurs régulièrement invoqué par le gouvernement et le président Sarkozy pour se défausser de leurs mesures budgétaires désastreuses.

Quant à attribuer au ridicule plan de relance la reprise économique, il ne faut pas pousser. Rappelons que le plan français ne comprend que 2 milliards environ de dépenses nouvelles et que ce n’est pas la réfection des monuments historiques aussi utile qu’elle soit qui réussira à sortir la France de la crise. Une autre raison qui permet de douter de l’origine de la « reprise » par le plan de relance, est un facteur invoqué par le gouvernement lui-même : il faut attendre un certain temps avant que le plan de relance ne produise ses effets. Attribuer le petit regain au plan de relance paraît plus que galvaudé. Selon « La Tribune », ce regain est dû aux exportations automobiles dopées par les différentes « primes à la casse » et pas à fantomatique plan de relance nationale. La politique gouvernementale aurait même tendance à retarder la reprise.


4e étape : La glorification de Goldman Sachs.
Oui, vous ne rêvez pas. Alors que le scandale du milliard provisionné par la BNP pour payer les bonus de ses traders a fait la une des journaux français, il n’y a pas si longtemps. Chez les jeunes populaires, on rappelle que Marcus Goldman a dû vendre ses fripes pour vivre car la banque qu’il avait créé ne lui rapportait pas assez à ses débuts. Et l’UMP de noter la différence avec la puissance de Goldman Sachs aujourd’hui. Précisons tout de même que la banque américaine a frôlé la faillite et n’a été sauvé que grâce aux plus de $14 milliards prêtés par le contribuable américain à la banque. Banque qui a versé environ $32 milliards de bonus à ses traders en 2008 et qui s’apprête encore à verser plus de $11 milliards à ces mêmes traders en 2009. Rappelons à toutes fins utiles que ce sont ces mêmes personnes qui ont mis l’économie mondiale dans le caniveau par les manœuvres ultra-risquées au niveau financier.

Louer le succès d’une banque qui ne doit sa survie qu’à l’aide du contribuable américain est plutôt malvenue. Surtout quand la banque en question a été épinglée par l’administration américaine du Trésor pour ses pratiques de rémunérations de ses traders qui dépasse de loin le milliard provisionné par la BNP.


5e et dernière étape : Tourner en ridicule l’extrême droite.
On vient à peine d’apprendre que l’UMP allait faire liste commune avec le MPF du souverainiste de Villiers et les chasseurs de CPNT de Nihous aux régionales de Mars prochain et l’UMP tourne en ridicule les affiches de Carl Lang qui mentionne « L’Europe aux européens » après « La France aux français » que celui-ci avait défendu lorsqu’il était au Front national. Les jeunes UMP d’ajouter que bientôt l’individu parlera de « La Terre aux terriens ». Quand on connaît l’art de Nicolas Sarkozy pour recycler les mots d’ordre du Front national, la critique du nationalisme de Carl Lang paraît hypocrite.


Bilan.
On note qu’à l’UMP, on cultive dès le plus jeune âge : la mauvaise foi, l’hypocrisie et l’art de la désinformation. Il est à la fois triste et inquiétant de voir que les jeunes populaires en sont arrivés à ses bassesses. Je suis certain qu’ils valent mieux que cela. D’abord pour eux-mêmes, mais surtout pour la France car certains d’entre eux seront parmi les décideurs de demain. C’est aussi un signe de la nécessité de présenter une alternative au projet sarkozyste qui mène la France dans le mur et accroît les inégalités sociales.

Preuve aussi qu’une alternative est possible, les dernières initiatives des Jeunes démocrates pour permettre aux jeunes militants du MoDem de participer aux grands évènements du MoDem dont l’Université de rentrée pour un coût modique et l’innovation et la créativité dont font preuve de manière plus générale les jeunes opposants qu’ils soient écologistes, socialistes ou démocrates pour proposer des alternatives à ce qui est présenté par les jeunes populaires.

6 commentaires:

JF le démocrate a dit…

D'un point de vue purement sociologique, je ne comprends pas et je n'arriverai jamais à comprendre que des jeunes - hors Jean Sarkozy naturellement - puissent adhérer aux valeurs de l'UMP.

Ou alors, c'est le signe que notre jeunesse est véritablement endoctrinée: la faute à quoi ou à qui? Peut-être aux excès du PS tout simplement.

Orange pressé a dit…

J'avoue que je trouve aussi cela difficile à croire. Mais, souvent, ce qui se passe c'est que l'adhésion des jeunes à l'UMP et à la droite en général est, je pense, plus incité par des facteurs locaux.

J'ai un camarade de promo qui vote et soutient l'UMP car il est dans une commune communiste et qu'il n'apprécie pas la politique locale menée.

Autre exemple, dans une autre commune, le député-maire local se présente comme sans étiquette mais bénéficie de toutes les investitures UMP, est soutenu par la section locale de l'UMP et a succédé un maire UMP devenu depuis sénateur.

L'adhésion aux idées de gauche se fait plus idéal par désir de vouloir faire disparaître la pauvreté, la faim, etc.

Orange pressé a dit…

J'avoue que je trouve aussi cela difficile à croire. Mais, souvent, ce qui se passe c'est que l'adhésion des jeunes à l'UMP et à la droite en général est, je pense, plus incité par des facteurs locaux.

J'ai un camarade de promo qui vote et soutient l'UMP car il est dans une commune communiste et qu'il n'apprécie pas la politique locale menée.

Autre exemple, dans une autre commune, le député-maire local se présente comme sans étiquette mais bénéficie de toutes les investitures UMP, est soutenu par la section locale de l'UMP et a succédé un maire UMP devenu depuis sénateur.

L'adhésion aux idées de gauche se fait plus idéal par désir de vouloir faire disparaître la pauvreté, la faim, etc.

Philippe de Montrouge a dit…

J'adore ce billet.

Une chose est sûre = les motivations des jeunes qui ont suivi Chirac en 95 du fait de son charisme sympathique et la motivation des jeunes UMP d'aujourd'hui ne sont forcement pas les mêmes, si l'on considère les leaders de leur mouvement.

Tous aussi détestables les uns que les autres, de part leur hypocrisie, leur mauvaise foi et leur usage éhonté voire ridicule du passage en force.
On peut les citer presque tous.

Lefevre Morano Copé, Dati Bertrand... Pécresse... Toute cette génération de politiques qui ont tout compris et qui nous expliquent qu'ils vont nous sauver de nous mêmes, contre notre gré, mais à leur avantage...

Maintenant les jeunes UMP sont avant tout des jeunes. Qui affirment, comme tous les jeunes, avant de vérifier ou de réfléchir...
Le but est d'en découdre pas de fonder un projet durable.

C'est vrai que les nôtres sont dans un certain sens plus réfléchis... Et ça fait plaisir.

Orange pressé a dit…

Disons que il semble que l'UMP joue plus sur l'effet de masse que sur la valorisation des qualités des militants. Les jeunes populaires sont vus pour les plus malins comme un vivier de futurs élus et pour la grande majorité comme une main d'œuvre corvéable et mobilisable à merci ou presque.

philippe a dit…

Arrêtons de parler de l'UMP, c'est le parti politique le plus important. Ils ont une politique désastreuse c'est vrai, mais il n'empêche qu'ils sont devant tous les partis politiques; arrêtez de critiquer ce parti et construisons un parti plus important, et mieux organisé....