La pêche au thon rouge est entrée dans une nouvelle ère. D'ailleurs, il serait plus juste de parler d'une « guerre du thon rouge ». En effet, les évènements ont franchi un palier plutôt sanglant. Mais avant d'en venir à cet évènement, il convient de voir comment les choses ont commencé.
Acte I - La protection des baleines.
Le lecteur averti se souvient probablement du naufrage de l'Ady Gil, ce trimaran à moteur de l'association Sea Shepherd qui avait été coulé par un baleinier japonais après s'être fait foncé dessus en plein océan Antarctique en janvier dernier. L'association, fondée à la fin des années 1970 par l'un des cofondateurs de Greenpeace qui trouvait cette dernière trop modérée, s'est ensuite spécialisée dans la traque à la pêche illégale de baleines, de requins, de phoques et à la lutte contre les filets dérivants. Ses méthodes (plutôt musclées) consistent à éperonner, aborder, voir à couler les navires pratiquant ces pêches illégales. Les pêcheurs braconniers le leur rendent bien puisqu'il est arrivé que les membres de l'association se fassent tirer dessus, et ce, à plusieurs reprises. Toutefois, aucun des armateurs ni même des membres d'équipage des navires visés n'a entamé d'actions en justice, ceux-ci se trouvant dans la plus parfaite illégalité lors des opérations menées. Par miracle, aucune personne n'a jamais été tuée ni même blessée lors de ces opérations.
Acte II - La lutte contre la pêche au thon rouge.
Si le rejet de la demande d'inscription du thon rouge sur le liste des espèces menacées de la CITES formulée par les États-Unis d'Amérique et soutenue par la France (1er pêcheur européen de l'espèce) en Mars 2010, ce qui aurait entraîné l'interdiction de pêcher l'espèce, fut une grande une énorme déception pour nombre de personnes et d'écologistes. Il semble que l'année 2010 soit l'occasion d'une prise de conscience de l'envergure du problème et de la nécessité de protéger l'espèce. Signe de ce changement, l'association Sea Shepherd, dont on peut voir les vidéos facilement sur des plate-formes du Youtube ou Dailymotion, a lancé en mai 2010 sa première opération en Méditerranée. Avec l'intervention de cette association, on aurait pu s'attendre à voir faire une nouvelle fois la presse en faire ses unes.
En réalité, c'est une autre association qui la fait. Cette association, c'est justement celle que Paul Watson a quitté : Greenpeace.
Cette dernière aurait-elle adopté les méthodes de sa petite sœur pour faire parler d'elle ? Le fait est que ce n'est pas le cas. Si Greenpeace est spécialisée dans les opérations de communication symboliques, elle ne recourt jamais à la violence et ses méthodes d'actions ont cependant généré des réactions violentes de la part des pêcheurs de thon.
Mais si l'opération menée au large de Malte s'est accompagnée des traditionnelles courses poursuites entre pêcheurs et écologistes. Cette fois, les pêcheurs n'étaient pas vraiment décidés à rester les bras croisés en regardant leur gagne-pain se faire la malle, et ont foncés avec leurs navires sur les militants de Greenpeace coulant au passage deux zodiacs. D'autres pêcheurs tentaient à partir de petites embarcations de mettre fin à l'action en usant de matériels plus dangereux comme des couteaux ou des lances dans le but délibéré de couler les embarcations gonflables d'écologistes, heureusement personnellement équipés pour éviter les drames.
Ces précautions n'ont toutefois pas empêché la réaction particulièrement disproportionnée de la part des pêcheurs. Ni que Frank Huston, un militant britannique de l'association, ne se fasse harponner et trainer sur plusieurs mètres (oui vous lisez bien, harponné !), par un pêcheur français lors de cette opération menée au large de Malte tandis que les militants écologistes accrochaient des sacs de sable au filet du « Jean-Marie Christian 6 », un thonier français, pour permettre aux thons rouges de s'échapper.
Ce samedi matin, le 05 juin 2010, d'autres militants de Greenpeace qui participaient, eux, à une action de sensibilisation du public ont été accueillis à coups de poings par des thoniers français restés à quai qui souhaitaient leur faire prendre un bain dans le Vieux port. L'association, par intermédiaire du site officiel de son antenne française, annonce qu'elle va déposer plainte et entamer des poursuites judiciaires. Plus que jamais déterminée à agir face à ce qu'elle qualifie, par l'intermédiaire de François Chartier, responsable de la campagne Océans : de défaillances de la part « de l’Iccat, la Cites, l’Union européenne et la France », « restant sourdes aux recommandations des scientifiques ». Ce dernier poursuit : « Si nous voulons sauver le thon rouge, il faut immédiatement stopper des pratiques de pêche irresponsables et destructrices ».
Pour se faire, Greenpeace demande un moratoire sur la pêche au thon rouge afin de permettre à l'espèce de se régénérer.
Une escalade inévitable ?
Jusqu'où les enchères en matière d'activisme vont-elles monter ? Auparavant la protection de l'environnement était pacifique, bon enfant, et les actions les plus dures consistaient à s'enchaîner à des rails pour empêcher la circulation de convois ferrés de déchets nucléaires ou déployer des banderoles au sein d'endroits interdits comme à l'Assemblée nationale en décembre 2009.
Mais le développement des associations comme la Sea Shepherd conservation society (SSCS) ou encore Peta recourant à la violence n'est pas sans poser de questions. Si dans ce cas, il convient de parler d'éco-guerriers, la réaction à l'encontre des activistes de Greenpeace montre combien le contexte est tendu entre des pêcheurs qui estiment avoir le droit de gagner leur vie dans le respect de la loi et des activistes déterminés à pallier les insuffisances d'une politique de protection des espèces défaillante.
Conclusion.
Les actions violentes sont en train de devenir la norme et il y a vraiment de quoi s'inquiéter. Si, par chance, le militant britannique a réussi à couper la ligne reliée au harpon qui passait au travers de sa jambe et à sauver sa vie. Il a tout de même été gravement blessé, son cas ayant nécessité de l'évacuer par l'hélicoptère vers un hôpital de Malte.
De ces évènements, la France mais surtout l'Europe seraient bien inspirées de tirer quelques leçons. Car il ne s'agit plus seulement de protéger l'environnement mais d'un véritable problème d'ordre public nécessitant la présence permanente d'une force de maintien de l'ordre réellement efficace. En ce sens, l'idée maintes fois émises mais jamais concrétisée de création d'une force fédérale de gardes côtes européens sur le modèle de leurs homologues américains, dotée des moyens adéquats en termes de matériels, de navires et d'hommes est plus que jamais indispensable.
Pour aller plus loin :
- L'article que le quotidien Le Monde consacre à l'évènement accompagnée d'une vidéo de l'activiste harponné.
- Un communiqué de Greenpeace repris par le blog Écolopresse.
- La page consacrée à l'évènement sur le site officielle de l'association Greenpeace.
Le tout est accompagné de vidéos montrant la violence de ce qui s'est passé.
Acte I - La protection des baleines.
Le lecteur averti se souvient probablement du naufrage de l'Ady Gil, ce trimaran à moteur de l'association Sea Shepherd qui avait été coulé par un baleinier japonais après s'être fait foncé dessus en plein océan Antarctique en janvier dernier. L'association, fondée à la fin des années 1970 par l'un des cofondateurs de Greenpeace qui trouvait cette dernière trop modérée, s'est ensuite spécialisée dans la traque à la pêche illégale de baleines, de requins, de phoques et à la lutte contre les filets dérivants. Ses méthodes (plutôt musclées) consistent à éperonner, aborder, voir à couler les navires pratiquant ces pêches illégales. Les pêcheurs braconniers le leur rendent bien puisqu'il est arrivé que les membres de l'association se fassent tirer dessus, et ce, à plusieurs reprises. Toutefois, aucun des armateurs ni même des membres d'équipage des navires visés n'a entamé d'actions en justice, ceux-ci se trouvant dans la plus parfaite illégalité lors des opérations menées. Par miracle, aucune personne n'a jamais été tuée ni même blessée lors de ces opérations.
Acte II - La lutte contre la pêche au thon rouge.
Si le rejet de la demande d'inscription du thon rouge sur le liste des espèces menacées de la CITES formulée par les États-Unis d'Amérique et soutenue par la France (1er pêcheur européen de l'espèce) en Mars 2010, ce qui aurait entraîné l'interdiction de pêcher l'espèce, fut une grande une énorme déception pour nombre de personnes et d'écologistes. Il semble que l'année 2010 soit l'occasion d'une prise de conscience de l'envergure du problème et de la nécessité de protéger l'espèce. Signe de ce changement, l'association Sea Shepherd, dont on peut voir les vidéos facilement sur des plate-formes du Youtube ou Dailymotion, a lancé en mai 2010 sa première opération en Méditerranée. Avec l'intervention de cette association, on aurait pu s'attendre à voir faire une nouvelle fois la presse en faire ses unes.
En réalité, c'est une autre association qui la fait. Cette association, c'est justement celle que Paul Watson a quitté : Greenpeace.
Cette dernière aurait-elle adopté les méthodes de sa petite sœur pour faire parler d'elle ? Le fait est que ce n'est pas le cas. Si Greenpeace est spécialisée dans les opérations de communication symboliques, elle ne recourt jamais à la violence et ses méthodes d'actions ont cependant généré des réactions violentes de la part des pêcheurs de thon.
Mais si l'opération menée au large de Malte s'est accompagnée des traditionnelles courses poursuites entre pêcheurs et écologistes. Cette fois, les pêcheurs n'étaient pas vraiment décidés à rester les bras croisés en regardant leur gagne-pain se faire la malle, et ont foncés avec leurs navires sur les militants de Greenpeace coulant au passage deux zodiacs. D'autres pêcheurs tentaient à partir de petites embarcations de mettre fin à l'action en usant de matériels plus dangereux comme des couteaux ou des lances dans le but délibéré de couler les embarcations gonflables d'écologistes, heureusement personnellement équipés pour éviter les drames.
Ces précautions n'ont toutefois pas empêché la réaction particulièrement disproportionnée de la part des pêcheurs. Ni que Frank Huston, un militant britannique de l'association, ne se fasse harponner et trainer sur plusieurs mètres (oui vous lisez bien, harponné !), par un pêcheur français lors de cette opération menée au large de Malte tandis que les militants écologistes accrochaient des sacs de sable au filet du « Jean-Marie Christian 6 », un thonier français, pour permettre aux thons rouges de s'échapper.
Ce samedi matin, le 05 juin 2010, d'autres militants de Greenpeace qui participaient, eux, à une action de sensibilisation du public ont été accueillis à coups de poings par des thoniers français restés à quai qui souhaitaient leur faire prendre un bain dans le Vieux port. L'association, par intermédiaire du site officiel de son antenne française, annonce qu'elle va déposer plainte et entamer des poursuites judiciaires. Plus que jamais déterminée à agir face à ce qu'elle qualifie, par l'intermédiaire de François Chartier, responsable de la campagne Océans : de défaillances de la part « de l’Iccat, la Cites, l’Union européenne et la France », « restant sourdes aux recommandations des scientifiques ». Ce dernier poursuit : « Si nous voulons sauver le thon rouge, il faut immédiatement stopper des pratiques de pêche irresponsables et destructrices ».
Pour se faire, Greenpeace demande un moratoire sur la pêche au thon rouge afin de permettre à l'espèce de se régénérer.
Une escalade inévitable ?
Jusqu'où les enchères en matière d'activisme vont-elles monter ? Auparavant la protection de l'environnement était pacifique, bon enfant, et les actions les plus dures consistaient à s'enchaîner à des rails pour empêcher la circulation de convois ferrés de déchets nucléaires ou déployer des banderoles au sein d'endroits interdits comme à l'Assemblée nationale en décembre 2009.
Mais le développement des associations comme la Sea Shepherd conservation society (SSCS) ou encore Peta recourant à la violence n'est pas sans poser de questions. Si dans ce cas, il convient de parler d'éco-guerriers, la réaction à l'encontre des activistes de Greenpeace montre combien le contexte est tendu entre des pêcheurs qui estiment avoir le droit de gagner leur vie dans le respect de la loi et des activistes déterminés à pallier les insuffisances d'une politique de protection des espèces défaillante.
Conclusion.
Les actions violentes sont en train de devenir la norme et il y a vraiment de quoi s'inquiéter. Si, par chance, le militant britannique a réussi à couper la ligne reliée au harpon qui passait au travers de sa jambe et à sauver sa vie. Il a tout de même été gravement blessé, son cas ayant nécessité de l'évacuer par l'hélicoptère vers un hôpital de Malte.
De ces évènements, la France mais surtout l'Europe seraient bien inspirées de tirer quelques leçons. Car il ne s'agit plus seulement de protéger l'environnement mais d'un véritable problème d'ordre public nécessitant la présence permanente d'une force de maintien de l'ordre réellement efficace. En ce sens, l'idée maintes fois émises mais jamais concrétisée de création d'une force fédérale de gardes côtes européens sur le modèle de leurs homologues américains, dotée des moyens adéquats en termes de matériels, de navires et d'hommes est plus que jamais indispensable.
Pour aller plus loin :
- L'article que le quotidien Le Monde consacre à l'évènement accompagnée d'une vidéo de l'activiste harponné.
- Un communiqué de Greenpeace repris par le blog Écolopresse.
- La page consacrée à l'évènement sur le site officielle de l'association Greenpeace.
Le tout est accompagné de vidéos montrant la violence de ce qui s'est passé.
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