La nouvelle est tombée tôt ce matin sur les telex des agences de presse et des principaux médias, le président de la République annonce que la France va progressivement retirer ses troupes d’Afghanistan d’ici la fin de l’année. Cette annonce en suit une autre, similaire, formulée la veille en soirée par le président américain Barack Obama. Un retrait qui n’intervient pas par hasard et qui, en réalité, n’en est pas tout à fait un.
Lutte contre le terrorisme.
La présence occidentale en Afghanistan fait suite aux attentats du 11 septembre 2001 qui ont provoqué la mort de plusieurs milliers de civils américains. Les États-Unis avaient alors décidé d’intervenir afin de capturer Ben Laden que les talibans refusaient d’extrader. Les européens sollicités depuis des lustres par le commandant Massoud avaient suivi, par solidarité avec les États-Unis d’Amérique mais aussi parce que leur propre sécurité était menacée. Au besoin, les attentats de Londres et Madrid ont fait rafraichit leur ont rafraichit la mémoire.
L’aide aux forces du commandant Massoud notamment russe, combiné aux moyens occidentaux ainsi qu’à quelques valises de dollars avaient rapidement permis de chasser les talibans du pays avant une occupation qui devait permettre d’installer une démocratie stable et prospère dans le pays selon l’administration Bush. Toutefois, la chose apparut très tôt impossible. Puis l’arrivée de l’administration Obama se traduisit par un retrait important de troupes d’Irak pour un redéploiement en Afghanistan afin d’accroitre la pression militaire sur Al Qaïda. Ce renforcement des troupes occidentales eut un relatif succès puisque le groupe terroriste eut à subir de nombreuses pertes. Néanmoins, cet effort s’accompagnait aussi d’une résurgence de la rébellion dans le pays.
Ce constat en demi-teinte s’explique par la structuration du pays. L’Afghanistan n’est pas un pays en soi ou même une nation clairement identifiée. Il s’agit d’une mosaïque composée de nombreux groupes structurées autour de chefs de guerre, de clans parmi lesquels les talibans ne sont qu’une minorité contrôlant chacun une vallée, un bourg, un morceau de route ou de territoires.
Al Qaida, un mouvement moribond.
Les renforts envoyés suite à l’arrivée d’Obama au pouvoir ont été relativement efficaces et ont trouvé leur couronnement dans la traque puis l’exécution de Ben Laden en cette année 2011. Privilégiant la discrétion à la fanfaronnade, l’administration Obama avait mis les moyens pour débusquer le chef de l’organisation terroriste. Le mouvement décapité, le groupe terroriste avait non seulement perdu sa figure de prou mais aussi son fondateur.
Les effectifs d’Al Qaida avaient déjà été passablement réduit en 2001 (on estime qu’alors 80% des effectifs avaient été tués et qu’une part de ses cadres avaient été capturés ou tués). La tactique du « surge » ayant permis de réduire presque à néant la capacité du mouvement. Si la mort de Ben Laden est un évènement, Al Qaida était déjà passablement affaiblie par la capture de Khalid Cheikh Mohammed en 2003. Dans ces conditions, il n’était plus utile de maintenir des effectifs conséquents en Afghanistan.
2012-2013, période électorale.
Au-delà de cette explication, il n’aura échappé à personne que les deux années à venir s’annoncent comme une période électoralement chargée. En effet, des élections législatives et/ou présidentielles vont avoir lieu dans la plupart des pays occidentaux à commencer par la France, les États-Unis et l’Allemagne. Barack Obama comme Nicolas Sarkozy souhaitant se faire réélire, un retrait militaire, au moins partiel, était inéluctable. Cet élément n’a pas non plus échappé aux insurgés afghans qui, en conséquence, ont décidé de ne pas donné suite aux tentatives de négociations des occidentaux. Pourquoi en effet négociés alors que ces derniers savent pertinemment que les soldats partiront quelque soit l’issue de ces pourparlers.
Quelques discussions ont néanmoins eu lieu afin de préparer le retrait des troupes mais aussi de tenter de pacifier le pays dans une relative mesure. C’est aussi dans cette perspective que les occidentaux ont détourné leur regard du trafic de drogue, principalement d’héroïne dont l’Afghanistan est le premier producteur mondial avec plus de 80% du « marché ». L’objectif étant d’associer au pouvoir le plus grand nombre possible de chefs de guerre réduisant de facto l’intensité de l’insurrection en Afghanistan.
Un retrait limité.
Néanmoins, à bien y regarder, on notera que les retraits de troupe sont limités. En effet, pas question de retirer tout le monde d’un coup d’une part parce que matériellement, les choses sont compliquées mais surtout parce que ce serait laisser le champ libre un peu trop rapidement aux insurgés. Le retrait sera donc progressif. Mais il sera aussi limité.
Tout comme le retrait des troupes d’Irak ne s’était pas soldé par un retrait total des troupes américaines, le retrait d’Afghanistan ne sera pas total. La raison est à chercher ailleurs. Il ne s’agit pas de tenter une nouvelle fois d’installer la démocratie en Afghanistan mais de stabiliser l’AfPak, nom donné à la zone regroupant l’Afghanistan et le Pakistan qui constitue la vraie unité territoriale pertinente. Pour une partie des services secrets pakistanais, il s’agit d’opposer un bloc islamiste soudé, virulent face au voisin indien. Mais ce bloc est particulièrement instable en raison de la multiplicité des intérêts et de la multiplicité des groupes le formant. Une instabilité qui s’étend au sous-continent mais aussi à l’international avec un risque terroriste non négligeable. Le rôle de l’Iran, quand bien même ce dernier est traversé par de profondes mutations internes, n’est pas non plus à négliger puisque le pays des ayatollahs pousse lui-aussi ses pions dans l’ouest de l’Afghanistan comme du Pakistan dans ce que l’on appelle, le Baloutchistan.
Quelle place pour la France ?
On le voit, la situation en AfPak est complexe. Sur ce plan, la situation de la France mérite que l’on s’y attarde. De longue date, la France était reconnu comme un interlocuteur fiable en raison de sa position originale dans le camp occidental. A l’ouest mais pas soumise, la France avait un rôle à part que sa diplomatie, historiquement importante parvenait à maintenir malgré la fin de son empire colonial. Mais, la décision discrétionnaire de Nicolas Sarkozy en mars 2009 de revenir dans le commandement intégré de l’OTAN avait fragilisé cette position.
Si la nomination d’Alain Juppé avec de réelles prérogatives au quai d’Orsay a permis de tempérer ce retour, les faits montrent une nouvelle fois que l’alignement atlantiste du président français sur les États-Unis d’Amérique. Il faut en effet se rendre compte que les européens souhaitaient retirer leurs troupes depuis 2010. Les allemands, notamment, traumatisés par le bombardement d’un camion citerne ayant entrainé la mort de nombreux civils souhaitaient partir depuis longtemps. La France quant à elle, n’avait accepté de se renforcer temporairement et de façon limité qu’en échange de quelques postes important au sein de la hiérarchie de l’OTAN. Ce sont bien les américains qui ont unilatéralement décidé de la date de retrait de leurs troupes selon leur propre calendrier, les autres n’ayant qu’à suivre.
Conclusion.
Le retrait prévu en Afghanistan n’est qu’une étape et ne changera pas drastiquement la situation. Et pour reprendre Winston Churchill : « Ce n'est pas la fin. Ce n'est même pas le commencement de la fin. Mais, c'est peut-être la fin du commencement ».
Lutte contre le terrorisme.
La présence occidentale en Afghanistan fait suite aux attentats du 11 septembre 2001 qui ont provoqué la mort de plusieurs milliers de civils américains. Les États-Unis avaient alors décidé d’intervenir afin de capturer Ben Laden que les talibans refusaient d’extrader. Les européens sollicités depuis des lustres par le commandant Massoud avaient suivi, par solidarité avec les États-Unis d’Amérique mais aussi parce que leur propre sécurité était menacée. Au besoin, les attentats de Londres et Madrid ont fait rafraichit leur ont rafraichit la mémoire.
L’aide aux forces du commandant Massoud notamment russe, combiné aux moyens occidentaux ainsi qu’à quelques valises de dollars avaient rapidement permis de chasser les talibans du pays avant une occupation qui devait permettre d’installer une démocratie stable et prospère dans le pays selon l’administration Bush. Toutefois, la chose apparut très tôt impossible. Puis l’arrivée de l’administration Obama se traduisit par un retrait important de troupes d’Irak pour un redéploiement en Afghanistan afin d’accroitre la pression militaire sur Al Qaïda. Ce renforcement des troupes occidentales eut un relatif succès puisque le groupe terroriste eut à subir de nombreuses pertes. Néanmoins, cet effort s’accompagnait aussi d’une résurgence de la rébellion dans le pays.
Ce constat en demi-teinte s’explique par la structuration du pays. L’Afghanistan n’est pas un pays en soi ou même une nation clairement identifiée. Il s’agit d’une mosaïque composée de nombreux groupes structurées autour de chefs de guerre, de clans parmi lesquels les talibans ne sont qu’une minorité contrôlant chacun une vallée, un bourg, un morceau de route ou de territoires.
Al Qaida, un mouvement moribond.
Les renforts envoyés suite à l’arrivée d’Obama au pouvoir ont été relativement efficaces et ont trouvé leur couronnement dans la traque puis l’exécution de Ben Laden en cette année 2011. Privilégiant la discrétion à la fanfaronnade, l’administration Obama avait mis les moyens pour débusquer le chef de l’organisation terroriste. Le mouvement décapité, le groupe terroriste avait non seulement perdu sa figure de prou mais aussi son fondateur.
Les effectifs d’Al Qaida avaient déjà été passablement réduit en 2001 (on estime qu’alors 80% des effectifs avaient été tués et qu’une part de ses cadres avaient été capturés ou tués). La tactique du « surge » ayant permis de réduire presque à néant la capacité du mouvement. Si la mort de Ben Laden est un évènement, Al Qaida était déjà passablement affaiblie par la capture de Khalid Cheikh Mohammed en 2003. Dans ces conditions, il n’était plus utile de maintenir des effectifs conséquents en Afghanistan.
2012-2013, période électorale.
Au-delà de cette explication, il n’aura échappé à personne que les deux années à venir s’annoncent comme une période électoralement chargée. En effet, des élections législatives et/ou présidentielles vont avoir lieu dans la plupart des pays occidentaux à commencer par la France, les États-Unis et l’Allemagne. Barack Obama comme Nicolas Sarkozy souhaitant se faire réélire, un retrait militaire, au moins partiel, était inéluctable. Cet élément n’a pas non plus échappé aux insurgés afghans qui, en conséquence, ont décidé de ne pas donné suite aux tentatives de négociations des occidentaux. Pourquoi en effet négociés alors que ces derniers savent pertinemment que les soldats partiront quelque soit l’issue de ces pourparlers.
Quelques discussions ont néanmoins eu lieu afin de préparer le retrait des troupes mais aussi de tenter de pacifier le pays dans une relative mesure. C’est aussi dans cette perspective que les occidentaux ont détourné leur regard du trafic de drogue, principalement d’héroïne dont l’Afghanistan est le premier producteur mondial avec plus de 80% du « marché ». L’objectif étant d’associer au pouvoir le plus grand nombre possible de chefs de guerre réduisant de facto l’intensité de l’insurrection en Afghanistan.
Un retrait limité.
Néanmoins, à bien y regarder, on notera que les retraits de troupe sont limités. En effet, pas question de retirer tout le monde d’un coup d’une part parce que matériellement, les choses sont compliquées mais surtout parce que ce serait laisser le champ libre un peu trop rapidement aux insurgés. Le retrait sera donc progressif. Mais il sera aussi limité.
Tout comme le retrait des troupes d’Irak ne s’était pas soldé par un retrait total des troupes américaines, le retrait d’Afghanistan ne sera pas total. La raison est à chercher ailleurs. Il ne s’agit pas de tenter une nouvelle fois d’installer la démocratie en Afghanistan mais de stabiliser l’AfPak, nom donné à la zone regroupant l’Afghanistan et le Pakistan qui constitue la vraie unité territoriale pertinente. Pour une partie des services secrets pakistanais, il s’agit d’opposer un bloc islamiste soudé, virulent face au voisin indien. Mais ce bloc est particulièrement instable en raison de la multiplicité des intérêts et de la multiplicité des groupes le formant. Une instabilité qui s’étend au sous-continent mais aussi à l’international avec un risque terroriste non négligeable. Le rôle de l’Iran, quand bien même ce dernier est traversé par de profondes mutations internes, n’est pas non plus à négliger puisque le pays des ayatollahs pousse lui-aussi ses pions dans l’ouest de l’Afghanistan comme du Pakistan dans ce que l’on appelle, le Baloutchistan.
Quelle place pour la France ?
On le voit, la situation en AfPak est complexe. Sur ce plan, la situation de la France mérite que l’on s’y attarde. De longue date, la France était reconnu comme un interlocuteur fiable en raison de sa position originale dans le camp occidental. A l’ouest mais pas soumise, la France avait un rôle à part que sa diplomatie, historiquement importante parvenait à maintenir malgré la fin de son empire colonial. Mais, la décision discrétionnaire de Nicolas Sarkozy en mars 2009 de revenir dans le commandement intégré de l’OTAN avait fragilisé cette position.
Si la nomination d’Alain Juppé avec de réelles prérogatives au quai d’Orsay a permis de tempérer ce retour, les faits montrent une nouvelle fois que l’alignement atlantiste du président français sur les États-Unis d’Amérique. Il faut en effet se rendre compte que les européens souhaitaient retirer leurs troupes depuis 2010. Les allemands, notamment, traumatisés par le bombardement d’un camion citerne ayant entrainé la mort de nombreux civils souhaitaient partir depuis longtemps. La France quant à elle, n’avait accepté de se renforcer temporairement et de façon limité qu’en échange de quelques postes important au sein de la hiérarchie de l’OTAN. Ce sont bien les américains qui ont unilatéralement décidé de la date de retrait de leurs troupes selon leur propre calendrier, les autres n’ayant qu’à suivre.
Conclusion.
Le retrait prévu en Afghanistan n’est qu’une étape et ne changera pas drastiquement la situation. Et pour reprendre Winston Churchill : « Ce n'est pas la fin. Ce n'est même pas le commencement de la fin. Mais, c'est peut-être la fin du commencement ».
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